Altertour 2008 - l’Altertour, c’est quoi ? (avr. 2008) Extrait de la Lettre d’Attac 45 n°45 (printemps 2008)

l’Altertour :

Un tour cycliste non dopé pour une Nature sans dopage.

En opposition avec l’esprit de compétition qui conduit au dopage dans le sport, et à la logique de l’agriculture intensive qui débouche sur les Plantes Génétiquement Modifiées, nous allons voyager ensemble dans un esprit de solidarité ! L’Altertour, c’est un autre Tour de France, qui dénonce le dopage sous toutes ses formes : dans le sport parce qu’il y porte atteinte aux sportifs pour le bénéfice de sponsors, et dans l’agriculture, parce qu’il y porte atteinte aux paysans et à la biodiversité pour le bénéfice des firmes productrices d’OGM et d’agrotoxiques.

C’est un Tour "à la carte", pour tout ceux qui souhaitent partager une belle tranche de vie collective, découvrir des terroirs préservés, faire du sport et dire ensemble : "Nous voulons un monde sans dopages". Cette manifestation itinérante veut faire la démonstration de notre soutien à celles et ceux qui luttent dans le monde entier contre les dopages agricoles, contre les atteintes à la biodiversité et à l’existence même des paysans. L’altertour participe à la campagne internationale "2008 : Année de Bannissement des OGM".

A cause des affaires de dopage, l’entreprise Deutsche Telekom annonce le 27 novembre 2007 qu’elle renonce à financer les compétions cyclistes, un soutien qu’elle pratiquait depuis 16 ans pour un montant annuel de 12 millions d’euros. Cette décision montre la fragilité d’un système qui a recours aux excès d’une technologie coûteuse pour assurer son succès. Si une grande firme ne souhaite plus que son nom soit associé au Tour de France, c’est aussi parce que cette vitrine médiatique est ternie par une impopularité grandissante.

La compétition sportive est à l’image de la concurrence qui mène le monde. La haute finance et la haute technologie y sont mises à contribution pour créer temporairement quelques vainqueurs, aux dépends de nombreux perdants. Lorsque les subventions européennes, les prêts bancaires, la mécanisation à outrance, la chimie et la microbiologie contribuent à doper l’agriculture intensive, quelques grandes firmes bénéficient d’une position dominante qui produit des victimes : ce sont la multitude de paysans du sud qui n’ont pas recours au dopage agricole, ce sont les forêts primaires qui sont irrémédiablement détruites, c’est la biodiversité adaptée aux différents milieux qui laisse la place à quelques monocultures sous perfusion chimique.

En mettant en cause le dopage, on dénonce l’esprit de compétition. En dénonçant l’esprit de compétition, on met en cause un comportement qui peut être modifié en améliorant nos connaissances. Si l’on comprenait mieux les relations qu’entretiennent les êtres vivants, si l’on connaissait réellement la composition des sols, on ne chercherait pas, avec des agro toxiques ou des modifications génétiques agressives et aléatoires, à dominer la nature ; on travaillerait avec.

La seule chose que l’on commence à comprendre aujourd’hui, en particulier avec le réchauffement climatique, c’est que l’approche intensive de l’agriculture, qui participe à une compétition internationale menée à tous les niveaux de l’activité humaine, va bientôt provoquer une grande perdante : la planète elle-même.

Il est temps de remplacer le modèle compétitif et le dopage qui lui est associé par un modèle solidaire, en sport comme en agriculture, puis par la suite en agriculture comme dans toute activité humaine. L’Altertour de la Biodiversité Cultivée pour une planète non dopée va donc commencer par faire la démonstration qu’une grande manifestation sportive solidaire est possible. Ce projet est également destiné à diffuser un ensemble d’expériences agricoles alternatives, telles que l’agriculture biologique, la distribution directe de proximité (AMAP, slow food), les jardins périurbains, les cultures de semences paysannes, les maisons écologiques,… qui bénéficient d’un recul suffisant pour en évaluer la validité, y compris sur le plan économique. C’est pourquoi la caravane de l’Altertour rencontrera le public en des points privilégiés du parcours, et prendra également rendez-vous avec des élus locaux, dans les villes et villages traversés, pour promouvoir le développement de projets agricoles alternatifs qui appellent un soutien politique.

Nous appuyant sur l’impopularité grandissante du dopage dans le sport, nous chercherons donc à rendre impopulaire le dopage en agriculture, tout en proposant des alternatives agricoles saines et réalisables selon un certain plan de développement. Si la prise de conscience de l’existence d’une agriculture dopée se généralise en 2008, par ailleurs « Année du Bannissement des OGM », peut-être la grande firme productrice d’OGM Monsanto, à l’image de Deutsche Telekom, renoncera-t-elle à ses investissements dans une filière génératrice de dopage ?

Un parcours cycliste familial

Le Tour de France, surnommé injustement « la grande boucle », est composé de segments d’étape indépendants ; les coureurs de ce tour prennent donc le train, voire l’avion, pour se rendre d’une Arrivée d’étape au lieu de Départ de l’étape suivante. De son côté, l’Altertour, qui se déroule en même temps que le Tour de France, forme réellement une grande boucle de plus de 2000 km autour du Massif Central.

L’absence de compétition implique que chacun contribue à l’effort général en fonction de ses capacités. Il suffira à chaque cycliste de parcourir à une allure tranquille un chaînon d’une quinzaine de km, puis de transmettre le relais aux partenaires suivants. L’ensemble des participants remportera l’épreuve si un drapeau avec logo est ainsi relayé de proche en proche, sur toute la longueur de la boucle.

Deux groupes de cyclistes sont prévus : ceux du matin et ceux de l’après-midi. Chaque cycliste a la possibilité de monter dans le véhicule-balai de la caravane à chaque arrêt sur l’un des stands distribués le long du chemin, une fois son chaînon de parcours accompli.
Une caravane accompagnera les cyclistes (véhicule de transport des cyclistes, charrette à vélos, bibliobus, ainsi qu des artistes ; mais aussi matériel de sonorisation, outillage de réparation pour les menus ennuis mécaniques des cyclistes, et surtout trousse de soins de premiers secours placée entre les mains d’une personne compétente).

Pour des raisons de sécurité et de logistique, nous devront limiter le nombre de participants inscrits pour chaque étape (ex : 80 cyclistes).

Un documentaire long-métrage

La plupart des actions militantes laissent peu de trace, sauf dans la mémoire de ceux qui y ont participé. « Un Autre Tour », le film réalisé par Suzanne Körösi permettra de prolonger dans le futur cette expérience de quelques semaines.
Ce documentaire « se propose de suivre les hommes, femmes et enfants, sensibilisés par la problématique du dopage de l’homme et la nature, amoureux et défenseurs de la biodiversité. Le film ira à la rencontre et peindra le portrait des cyclistes et des organisateurs.
Qui sont-ils ? Comment voient-ils le monde dans lequel ils vivent ? De quel monde, de quel avenir rêvent-ils ? Comment voient-ils l’avenir de l’humanité ? Que pensent-ils du "progrès", du "développement", de "la croissance", de la "compétition", du "profit", mots-clés de notre civilisation occidentale ? Quelles alternatives proposent-ils ?

Continuer la lutte !

Alors que les preuves d’une mauvaise gestion des ressources naturelles s’accumulent au niveau planétaire sans modifier significativement les habitudes de comportements individuels, et tandis que la majorité des électeurs continue à favoriser la vision libérale et compétitive de l’économie, la tentation est grande de « baisser les bras » chez ceux qui agissent depuis plusieurs années pour qu’un autre monde se réalise.
L’apparent retrait de certains militants trouve par ailleurs paradoxalement son origine dans la réussite de leur action au niveau local. A quoi bon continuer à dénoncer les OGM si le gouvernement lui-même réalise leur peu d’intérêt ? Or, les OGM restent un problème au niveau international. De plus, ils représentent seulement la partie visible de l’iceberg de l’agriculture industrielle, que le réchauffement militant doit encore contribuer à faire fondre. Après avoir lutté « contre » un système, il faut agir « pour » un autre modèle, en démontrant que celui-ci est viable économiquement sans être pour autant au service d’intérêts privés.

Pour être efficace, il faut agir de concert, en réunissant les complémentarités autour d’un projet à la fois festif et sérieux, éducatif et ludique, avec l’espoir qu’il servira le minimum requis de notre cause commune : contribuer à éviter la destruction de l’environnement tout en faisant revivre le monde agricole.

L’Altertour de la Biodiversité Cultivée pour une planète non dopée offre cette opportunité.