Formes d’endettement public / titres de dette publique / agences de notation / CDS

, par Christine

Lorsque les ressources (recettes) d’une administration publique (administrations publiques centrales, administrations publiques locales et administrations de sécurité sociale) ne couvrent pas les dépenses, elle doit couvrir son déficit en s’endettant.


1) Les formes de l’endettement

Il existe actuellement 3 formes de financement :

  1. Emission de titres de la dette publique : c’est la principale forme d’endettement des grands Etats capitalistes
      i. Titres à long-terme (Obligations Assimilables du Trésor ou OAT), émis pour une durée de 7 ans minimum à 50 ans maximum, taux fixes ou variables.
      ii. Titres à cout-terme (BTAN : Bons du trésor à intérêt annuel, durée 2 à 5 ans) (BTF : Bons du trésor à taux fixes et à intérêts précomptés [l’ensemble des intérêts est prélevé dès le début de la transaction. Dans le cas d’un emprunt de 1000 euros à un taux de 5%, l’emprunteur recevra une somme de 950 euros] , durée inférieure à 1 an).
  2. Obtention de crédit bancaire (France : communes, départements, hôpitaux et Etats des pays du tiers-monde)
  3. Recours (pour les Etats) aux prêts des organismes internationaux comme le FMI, mais prêts sous conditions (austérité, privatisations…).

Jusqu’à la loi du 3 janvier 1973, qui a obligé le gouvernement à avoir recours au secteur privé pour financer sa dette, le gouvernement français émettait des titres d’Etat qui étaient achetés par la Banque de France. En contrepartie, cette dernière émettait de la monnaie sous forme de crédit à l’Etat.

La dérèglementation et la libéralisation financière des années 1980 ont été décisives pour mettre la dette publique française (parmi d’autres) sous la coupe des marchés et des investisseurs non résidents. En 2010, environ 70% de la dette publique française était détenue par les investisseurs étrangers. De plus, le taux d’intérêt réel a fortement augmenté entre 1980 et 1995 (politique monétaire restrictive).


2) Les caracéristiques des titres de la dette publique

L’émission de titres de la dette publique est la seule forme d’endettement de l’Etat français.

Un petit groupe de banques jouent un rôle déterminant dans ces émissions sur les " marché"s primaires" . Les titres de la dette publique sont ensuite revendus sur les marchés financiers, essentiellement les bourses, appelés "marchés secondaires ". Les titres de dette publique sont ainsi diffusés vers ceux qui souhaitent en détenir (institutions financières, ménages….).

Les titres de la dette publique se caractérisent par 3 éléments :

  1. Valeur de remboursement,
  2. Taux d’intérêt au moment de leur ?mission,
  3. Monnaie dans laquelle ils sont ?mis.

Les organismes financiers qui les achètent pour spéculer tiennent compte de ces éléments (détermination du profit). Sur les marchés financiers, les cours (prix) des titres de dette publique varient constamment.


3) Agences de notation financière


➢ Le rôle des agences de notation est de mesurer le risque de non remboursement des dettes que présente un emprunteur (entreprise, Etat, collectivité locale : communes, départements, régions) ou une opération financière.

➢ Les 3 plus grandes agences de notation mondiales sont Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch, toutes américaines.

➢ Ces agences notent à leur demande, contre rémunération, les entreprises mais aussi les collectivités publiques, y compris les Etats. La meilleure note, AAA, correspond à un investissement considéré comme sans risque.

➢ Si la notation est inférieure à AAA, l’investisseur exigera le paiement d’un taux d’intérêt incluant une "prime de risque" pour couvrir le risque de perte.

➢ Ainsi, un état mal noté (ou un Etat dont la qualité de la dette est considérée comme moins bonne que le triple AAA dont il bénéficie) doit supporter un écart entre le taux qu’il a à payer pour emprunter et celui que paye pour emprunter un pays de référence. Cet écart s’appelle le "spread". En Europe, le "spread" est calculé actuellement par rapport aux taux d’intérêt des titres d’état de l’Allemagne.

➢ Les agences de notation sont des organismes privés, en principe indépendants. Elles déclarent que leurs critères de jugement sont purement financiers, mais elles tiennent compte de la stabilité politique par exemple.

➢ Elles sont critiquées pour :


     L’opacité de leur notation,
     Le caractère oligopolistique du secteur de la notation (3 agences accaparent presque tout le marché de la notation),
     Les conflits d’intérêt existant entre leur mode de rémunération et la notation (leurs revenus proviennent des émetteurs de dette à qui les agences attribuent des notes),
     La difficulté des agences à anticiper les défaillances des emprunteurs (erreurs fréquentes dans le passé).
     Une tendance à sur-réagir une fois la crise confirmée (aggravation des crises, cas Grec par exemple),
     La discontinuité des notations (amplification de la variation des cours).

Les agences de notation ont acquis un pouvoir considérable en notant les dettes souveraines car une mauvaise note se traduit par un coût d’emprunts plus élevé, c’est à dire des charges supplémentaires pour le budget.

La réglementation bancaire internationale impose aux banques de détenir des titres bien notés, d’où la présence des titres d’état dans leur bilan. Mais les titres de dette publique, autrefois considérés comme une garantie, se sont transformés en risque.

En fait, l’importance qu’a prise la notation des dettes souveraines révèle surtout la forte dépendance des Etats aux marchés financiers.


4) Dette souveraine et spéculation


Fin 2011, les taux des obligations liées au financement des dettes européennes étaient parmi les plus élevés des pays industrialisés.

Le niveau de ces taux ne reflête pas seulement un risque accru de défaut de remboursement des pays émetteurs, mais est aussi alimenté par la spéculation, notamment à cause des CDS.

Les CDS sont des sortes de police d’assurance destinées à protéger un investisseur contre le risque de non-remboursement d’un titre de dette qu’il détient.

Toutefois, des établissements financiers ont souscrit des CDS sans posséder ces titres de dette. C’est ce que l’on appelle des ventes à "nu" ("CDS à nu"), notamment dans le cas de la dette grecque. Par exemple, les achats massifs de "CDS à nu"sur la dette grecque ont fait bondir les prix des CDS et incité les véritables détenteurs d’obligations d’état grecques à acheter eux aussi des CDS, revendus par les spéculateurs en réalisant des fortes plus-values.

Une étude statistique de la Banque de France conclut que pour la Grèce, l’Irlande, l’Italie, l’Espagne, et le Portugal, les variations de taux des CDS influencent directement celles des obligations d’Etat, et plus particulièrement lorsque les agences de notation modifient la note d’un pays.

L’Union européenne a décidé de limiter à partir du 1er janvier 2012 le recours à aux contrats "CDS à nu" utilisés sur les marchés pour spéculer sur les difficultés des dettes publiques.

Toutefois, les états qui le souhaitent pourront ne pas appliquer ce règlement pendant une période donnée et l’accord européen ne s’attaque pas aux CDS "normaux" (lorsque l’investisseur détient des titres de dette) qui sont eux aussi objet de spéculation.


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