Perspectives pour une nouvelle dynamique d’Attac

Une contribution de plusieurs élus du Conseil d’administration (CA) et membres fondateurs présents régulièrement au CA
jeudi 23 septembre 2004

site d’Attac France
Bourboulon Isabelle - Brugvin Thierry - Cipière Jean-Luc - Crémieux Robert - Cuttaia Stéphane - Denimal Florent - Dufour François - Flipo Fabrice - Gathier Laurent - George Susan - Khalfa Pierre - Le Quéau Serge - Lionis Marie - Lusson Julien - Massiah Gustave - Masson Geneviève - Pierre Christian - Pilichowski Christian - Pourre Annie - Rallet Daniel - Régnier Gérard - Renault Ursula - Richez Albert - Tartakowsky Pierre - Zafari Sophie

Elus du Conseil d’administration (CA) et membres fondateurs présents régulièrement au CA, nous désirons ici apporter une contribution collective au débat engagé à partir de la discussion sur une "nouvelle dynamique" pour Attac. Ce débat est d’autant plus nécessaire que notre association a connu à plusieurs reprises des tribulations qui ont mis en évidence, certes des problèmes de fonctionnement, mais aussi, comme il est bien naturel, des débats sur des conceptions différentes du rôle d’Attac qui ne sont pas sans lien avec ceux-ci. ’Attac France->http://www.france.attac.org/a3549]de plusieurs élus du Conseil d’administration (CA) et membres fondateurs présents régulièrement au CA : Bourboulon Isabelle - Brugvin Thierry - Cipière Jean-Luc - Crémieux Robert - Cuttaia Stéphane - Denimal Florent - Dufour François - Flipo Fabrice - Gathier Laurent - George Susan - Khalfa Pierre - Le Quéau Serge - Lionis Marie - Lusson Julien - Massiah Gustave - Masson Geneviève - Pierre Christian - Pilichowski Christian - Pourre Annie - Rallet Daniel - Régnier Gérard - Renault Ursula - Richez Albert - Tartakowsky Pierre - Zafari Sophie

Elus du Conseil d’administration (CA) et membres fondateurs présents régulièrement au CA, nous désirons ici apporter une contribution collective au débat engagé à partir de la discussion sur une "nouvelle dynamique" pour Attac. Ce débat est d’autant plus nécessaire que notre association a connu à plusieurs reprises des tribulations qui ont mis en évidence, certes des problèmes de fonctionnement, mais aussi, comme il est bien naturel, des débats sur des conceptions différentes du rôle d’Attac qui ne sont pas sans lien avec ceux-ci.

Parler de nouvelle dynamique pourrait laisser supposer que l’ancienne a épuisé ses effets. C’est donc par là que nous commencerons en revenant sur "l’objet" Attac puis en abordant les questions liées à son fonctionnement. Enfin nous terminerons par les enjeux actuels. Si nous centrons nos propos sur Attac France, nous ne perdons pas de vue que notre association s’intègre dans des mouvements plus vastes, le mouvement Attac international et le mouvement altermondialiste, qui sont confrontés à des problèmes en partie similaires.

La dynamique d’Attac est-elle épuisée ?

Pour répondre à cette question, il est nécessaire de voir d’où l’on vient et d‚analyser les évolutions en cours. Le néolibéralisme a connu une période de domination totale, non seulement par les politiques menées par les différents gouvernements et les institutions internationales, mais aussi sur le plan idéologique. La situation actuelle est beaucoup plus contrastée.

Attac, et plus globalement le mouvement altermondialiste, ont été porteurs de trois avancées. Le mouvement a d’abord permis que s’exprime politiquement un refus fondamental du néolibéralisme, tant par les manifestations de masse qu’il a été capable d’organiser à travers le monde que par le processus des Forums sociaux. Il a commencé à faire émerger l‚idée qu’un autre monde est possible, mettant en avant des valeurs communes - la régulation par les droits, la démocratie participative, le progrès social -, se traduisant par de nombreuses propositions concrètes, applicables immédiatement et dessinant des esquisses d‚alternatives. Il a ainsi opéré un début de reconquête des esprits, certes fragile, mais décisif.

Ce processus explique l’élargissement considérable du mouvement altermondialiste, l’agrégation continue de forces nouvelles en son sein, chacune y entrant avec son histoire, ses préoccupations, ses orientations. En France, Attac a joué un rôle moteur dans ce processus. Son apport principal a été d’essaimer ses idées et d’avoir été la force d’entraînement qui a permis d’élargir et d’accélérer la prise de conscience dans la société.

Cependant l’offensive néolibérale se poursuit et, sous de nombreux aspects, s’approfondit. Il est inutile de développer ce point, tant les exemples abondent. Mais cette offensive se déploie dans une situation marquée par la prise de conscience par des secteurs de plus en plus larges des opinions publiques des méfaits des politiques néolibérales, des impasses et des catastrophes auxquels aboutissent les processus de marchandisation tous azimuts engendrés par le capitalisme néolibéral. Si une brèche à été ouverte, personne n‚a réussi à construire les rapports de force nécessaires pour bloquer cette offensive ni à peser durablement sur les politiques publiques. Il est donc plus que jamais nécessaire de continuer la bataille d’idées et la construction de convergences dans cette perspective.

C’est ce qui justifie à nos yeux la nécessité d’une nouvelle dynamique pour Attac et plus largement pour le mouvement altermondialiste. En définissant Attac comme "un mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action", nous avions donc parfaitement identifié les trois axes de notre combat : déconstruire l’idéologie néolibérale, élaborer des alternatives et construire les rapports de force pour imposer des orientations nouvelles. Cette triple perspective reste valide, même si elle doit se déployer dans un contexte nouveau, ce qui implique pour Attac un rebond.

Loin d’être obsolète, le projet initial d’Attac garde toute sa pertinence. Nous avons ici une première condition pour une "nouvelle dynamique" : celle-ci ne pourra se construire que sur la base de notre identité de mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action. C’est à partir d’elle que nous pourrons rassembler et agir.

Attac, une diversité porteuse d’espoir

La spécificité d’Attac a souvent été décrite, mais il importe d’y revenir car elle constitue un des enjeux du débat actuel. Attac regroupe des individus et des organisations assez divers tant sur le plan politique et idéologique que sur celui des préoccupations immédiates et des orientations concrètes. Une grande partie de l’impact d’Attac dans la société vient de sa capacité à fédérer ces différences, non à les fondre, mais à les dépasser en vue d’un combat commun sur la base de valeurs partagées.

Si Attac n’est pas un cartel d’organisations, elle n’est pas non plus un espace où tous les chats sont gris, où les identités sont niées, où les différences ne doivent plus s’exprimer. Bien au contraire, ces différences sont une richesse, à condition que chacun ait la volonté de travailler ensemble à des objectifs communs. D’où l’importance du mode de décision au consensus qui force chacun à transcender son point de vue de départ dans la confrontation avec les autres. Dans sa pratique passée, Attac n‚a jamais confondu le consensus avec une unanimité paralysante. Il s’agit d’un mode de prise de décisions efficace qui doit être maintenu.

Le risque est de voir aujourd‚hui cette diversité d’Attac remise en cause. Et c’est en cela que les questions liées au mode de fonctionnement de l’association prennent une dimension politique. Les raidissements et les crispations nés des difficultés, les tentations de "séparer le bon grain de l’ivraie" et d’opposer membres fondateurs et membres actifs se multiplient. Au-delà de l’affaiblissement de l’aura démocratique d’Attac dans et hors l’association, stigmatiser une partie de l‚association et, au-delà, certaines composantes de l‚altermondialisme, comme cela est fait régulièrement, croire que l’on peut homogénéiser Attac et le mouvement dans son ensemble, ne peut conduire qu‚à un dépérissement, voire un éclatement. Négliger la pensée critique et opposer à la pensée unique du néolibéralisme une nouvelle pensée non moins unique serait courir à l‚impasse.

Nous refusons une telle perspective. Nous avons ici la deuxième condition d’une nouvelle dynamique pour Attac : la diversité, sa capacité de rassemblement, richesse essentielle de l’association, doit être maintenue et cultivée.

Appliquer la démocratie participative au sein d’Attac

Il s’agit de penser un mode de fonctionnement qui permette à tous d’enrichir la dynamique d’Attac, la diversité d’Attac s’exprimant aussi dans la nature de ses composantes : adhérents individuels, comités locaux, associations et organisations syndicales. Certaines organisations sont membres fondateurs et jouent aujourd’hui un rôle particulier dans l’association puisqu’elles sont statutairement majoritaires au CA. Cette situation, si elle pouvait trouver des justifications à la naissance de l’association, ne peut plus perdurer. Nous devons d’abord aller vers une reconnaissance pleine et entière du rôle des comités locaux. Même s’ils ne regroupent qu’une minorité des adhérents, ils forment la colonne vertébrale de l’association, sa force militante. La création de la Conférence nationale des comités locaux (CNCL), après de vifs débats lors de l’assemblée générale de Saint-Brieuc en octobre 2000, et la charte qui s’en est suivie, ont permis des avancées non négligeables en matière de prises de décisions dans l’association. Il s’agit maintenant d’aller plus loin en articulant encore mieux l‚activité des comités locaux et le national et en reconnaissant à la CNCL un rôle de codécision politique avec le CA.

Une telle perspective suppose d‚améliorer le fonctionnement de la CNCL et des comités locaux eux-mêmes : discussion en amont dans les comités locaux pour que leurs représentants à la CNCL expriment un point de vue collectif ; suivi du travail de la CNCL pour assurer à celle-ci une permanence politique propre à une certaine efficacité.

Mais améliorer la démocratie participative au sein d’Attac, c’est changer la composition du CA. Elle pourrait être modifiée de la façon suivante : l’instauration de deux collèges clairement identifiés : un collège des membres fondateurs et un collège des membres actifs comportant le même nombre de représentants. L’intégration, sans droit de vote, au CA de six membres actifs, allait dans ce sens. Il s’agit là aussi d’aller plus loin en donnant le même statut à tous les membres du CA et en faisant en sorte que les élus des adhérents directs soient porteurs d’une légitimité incontestable. Dès lors que tous les membres du CA ont, quoique issus de collèges différents, le même statut et donc les mêmes droits, les responsabilités de président, de vice-présidents, de secrétaire général, de trésorier, devront pouvoir être accessibles à tous. Lors de l’élection du dernier CA, une procédure de désignation de candidats par six grandes régions avait été mise en place lors d’une CNCL. Si cette procédure partait d’une intention louable, celle d’assurer une légitimité forte aux élus membres actifs, elle a néanmoins été entachée d’incompréhension et d‚insatisfaction et il faut donc pousser notre réflexion sur ce point.

S‚il faut améliorer le processus démocratique d‚investiture, il faudra aussi renforcer, durant leurs mandats, les liens existants entre les élus membres actifs du C.A et les comités locaux qui les ont investis. L’efficacité du travail de terrain souvent remarquable effectué par les élus issus des membres actifs a tout à gagner à ce renforcement. C’est, de plus, un gage de démocratie car celle-ci suppose que les élus puissent se faire l’écho des préoccupations des adhérents. Là aussi, même s’ils ne représentent qu’une minorité des adhérents, les comités locaux jouent un rôle d’indispensable interface avec ceux-ci. Cette évolution nous paraît souhaitable pour une association qui se réclame de la démocratie participative.

Toutes ces propositions devraient s‚inscrire dans une modification des statuts. Si celle-ci s‚avérait impossible, au vu de l’extrême difficulté à les changer, il nous faudrait réfléchir aux moyens de les mettre néanmoins en ?uvre.

Mais tous ces changements n’auraient, de fait, que peu de portée si le style actuel de direction perdurait. La culture de l‚organisation qu‚il nous faut construire implique un changement radical du style de direction sous peine de voir le débat politique - au sens plein du terme -, dériver vers le conflit permanent. Il nous paraît décisif que :

le respect mutuel remplace les procédures bureaucratiques et les rappels permanents au règlement ;

la reconnaissance des multiples apports au sein de l‚association l‚emporte sur un autoritarisme porteur d’affrontements ;

la préparation collective de l‚expression de l‚association soit la règle et nourrisse les déclarations extérieures ;

un fonctionnement inclusif de toutes les sensibilités l‚emporte sur les tentatives régulières de mise à l‚écart des personnes "dérangeantes".

Nous avons là une troisième condition pour une nouvelle dynamique pour Attac : le fonctionnement de l’association doit profondément changer, le style de direction doit être radicalement transformé pour être adapté à nos objectifs et s’inscrire dans un processus de démocratie participative.

Les enjeux actuels

Ces enjeux concernent à la fois Attac et le mouvement altermondialiste. Le premier est celui de la capacité à faire travailler ensemble toutes les forces du mouvement altermondialiste. Comment maintenir l’unité du mouvement dans et malgré sa diversité ? Attac peut jouer un rôle fondamental pour aider à résoudre cette question. C’est parce que nous sommes nous-mêmes capables de fédérer en notre sein que nous pouvons aider à créer du liant entre toutes les forces du mouvement, et ce à tous les niveaux. Par exemple au niveau local, nous savons qu’Attac joue souvent ce rôle de lien entre différentes forces, faisant en sorte qu’un travail en commun puisse se développer. Une multitude d‚exemples un des derniers en date étant les Etats généraux de la santé et de l’assurance-maladie -, montre que, malgré les difficultés, il est possible d’avoir une démarche fédérative au niveau national. Il en est de même au niveau européen où Attac a souvent été la force capable de construire les avancées qui ont permis que le processus du Forum social européen (FSE) puisse se développer.

Une attention particulière doit d’ailleurs être donnée au niveau européen qui surdétermine aujourd’hui pour une large part les politiques nationales. Alors que le 3ème FSE s’apprête à se tenir, nous devons nous engager résolument dans la construction de rapports de force à l’échelle européenne. Pour ce faire, nous devons partir de l’acquis que constitue le processus du FSE qui a montré, non sans difficultés, sa capacité à élargir son assise géographique et à agréger en son sein une diversité importante de forces. Le FSE, qui constitue un moment d’apparition politique fort du mouvement altermondialiste en Europe, peut donc servir de point d’appui pour l’élaboration de propositions alternatives et pour la construction de mobilisations sociales et citoyennes.

Il doit en être de même au niveau mondial. La dimension mondiale de notre lutte est évidemment déterminante. Elle implique qu‚Attac doit s‚inscrire résolument dans la solidarité internationale, c‚est-à-dire donner toute leur place dans nos priorités aux campagnes et aux propositions sur le système mondial (taxes globales, commerce international, annulation de la dette, défense des équilibres écologiques, etc.), mais aussi porter une attention particulière à tout ce qui concerne la solidarité internationale dans notre propre société et aux conséquences sociétales et écologiques de la mondialisation néolibérale (migrations, racismes sous toutes ces formes, rôle des entreprises françaises et des intérêts économiques et politiques français dans le système international, etc.)

Nous récusons la vision d’Attac, qui oppose la construction d’Attac et celle du mouvement altermondialiste et qui conduirait à isoler Attac et quelques fois même à opposer Attac au mouvement altermondialiste sous prétexte d’éviter une dilution de l’association. L’expérience récente a d’ailleurs montré qu’Attac ne se développait jamais aussi bien que lorsque son action était articulée avec celle d’un mouvement social et citoyen qui la dépasse.

Nous avons là une quatrième condition pour une nouvelle dynamique pour Attac : Attac doit avoir comme préoccupation de favoriser la construction de convergences entre toutes les forces du mouvement altermondialiste.

Mais l’unité du mouvement altermondialiste n’est, bien entendu, pas une fin en soi. Comment faire pour que la diversité du mouvement n’aboutisse pas à la paralysie et que ce mouvement puisse agir pour contribuer à transformer concrètement la réalité et écarter les mailles du filet libéral ? S’il n’y a pas de réponse simple à cette question, nous identifions trois pistes. La première concerne la construction des alternatives et la définition de leur contenu. Le mouvement altermondialiste est aujourd’hui en accord sur un certain nombre de valeurs et des propositions ont vu le jour sur de nombreux sujets. Si un travail de mise en cohérence reste à faire et si le débat doit avancer sur un certain nombre de points (croissance/décroissance, nucléaire), la construction d’un "consensus de Porto Alegre" est aujourd’hui à l’ordre du jour pour donner une visibilité politique aux propositions alternatives du mouvement altermondialiste.

Un tel processus n’a de sens que s’il se déroule à tous les niveaux, du local au mondial en passant par le niveau national et européen. Mais surtout il doit être le fruit d’une confrontation entre tous les acteurs du mouvement permettant ainsi une véritable appropriation des propositions qui en résulteraient. Attac doit prendre les initiatives politiques pour que ce processus se mette en route. Cela suppose que, dans le même temps, Attac fasse, pour ce qui la concerne, un travail identique de mise en forme de ses propositions.

Attac a un rôle clé à jouer pour aider à sortir des pièges dans lesquels le capitalisme néolibéral plonge la société :

premier exemple de piège : chômage à cause d‚une croissance économique faible ou pollution et épuisement des ressources à cause d‚une croissance forte et orientée vers le profit. De par sa position fédérative, Attac doit être en mesure de formuler des propositions pour faciliter la mise en cohérence des revendications sociales et écologiques.

second exemple de piège : participation à la compétition économique internationale pour être les plus forts et exporter le chômage ailleurs ou accepter les vagues successives de délocalisations au fur et à mesure que le capitalisme intègre des nouvelles zones dans son giron. De par sa préoccupation et sa dimension, toutes deux internationales, Attac doit porter des propositions permettant de construire progressivement des droits unifiés pour tous les peuples et des formes de coopération économique plutôt que de concurrence.

Nous ne sommes qu‚au début d’une phase d‚explicitation et l‚on voit bien qu‚Attac, mouvement d‚éducation populaire tourné vers l‚action, n‚est pas dans la démarche d‚apporter la bonne parole toute faite mais se situe dans une démarche d‚élaboration collective : autrement dit, nous nous éduquons nous-mêmes en même temps que nous souhaitons apporter notre contribution à la société.

Le deuxième niveau de réponse concerne les questions de stratégie. Comment faire pour créer les rapports de force nécessaires pour bloquer l’offensive néolibérale et imposer nos alternatives ? Le mouvement altermondialiste doit avant tout être en mesure de se fixer des thèmes prioritaires d’action qui permettent la création du rassemblement le plus large possible afin de créer des rapports de forces victorieux. Il s’agit donc de se fixer les cibles que nous pouvons atteindre afin d’obtenir des victoires partielles qui permettent de desserrer l’étreinte du libéralisme. La construction d’un vaste mouvement social à l’échelle européenne doit devenir une de nos priorités et nous devons aider à donner une ampleur nouvelle à des campagnes internationales centrées sur des revendications précises, les taxes globales par exemple. Dans ce cadre, nous gagnerions à une meilleure coordination du réseau des Attac afin de lui permettre de jouer un rôle d’impulsion plus important qu’actuellement.

C’est ainsi en faisant la preuve d’une nouvelle efficacité que nous pourrons élargir la base sociale du mouvement et être en phase avec "les classes populaires". Celles-ci ne se reconnaîtront dans Attac et plus largement dans le mouvement altermondialiste qu‚à la condition, non seulement que leurs préoccupations concrètes soient prises en compte, mais aussi que nous soyons capables de faire la preuve de notre efficacité pour transformer un tant soit peu le monde qui nous entoure. C’est un défi essentiel qu’il nous faudra être capable de relever en nous appuyant notamment sur les membres fondateurs qui, de par leurs activités, sont directement en contact avec elles.

Ces deux premiers niveaux de réponses conduisent à une cinquième condition pour une nouvelle dynamique pour Attac : Attac doit être capable de prendre les initiatives nécessaires pour que le mouvement altermondialiste se dote de propositions alternatives clairement identifiées et de stratégies d’action efficaces.

Le troisième niveau de réponse concerne notre rapport au politique. Ce problème est l’objet d’un débat récurrent dans notre association. Il est souvent formulé en terme de "débouché politique du mouvement". Cette expression nous semble mauvaise de deux points de vue. D’abord elle semble réduire la politique au débouché électoral alors qu’Attac a justement l’ambition d’être un acteur politique à part entière en tant que mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action. Ensuite cette notion remet au goût du jour une hiérarchisation, de fait, entre mouvement social et partis politiques, ces derniers étant censés seuls être capables de traduire dans les faits les exigences du premier.

Dans ce cadre, la proposition d’une résolution pour la prochaine assemblée générale indiquant qu’Attac ne veut pas se transformer en parti politique ne suffit pas pour faire avancer cette question. D’ailleurs, extrêmement peu d’adhérents défendent un point de vue contraire. Le problème posé par les listes 100% n’était pas la transformation d’Attac en parti politique, mais l’instrumentalisation de l’association à des fins qui lui étaient étrangères. Une première discussion a eu lieu au CA d’Arles sur la perspective de 2007. Elle a conduit à un premier point d’accord concernant la nécessité de faire apparaître des propositions alternatives en rupture avec la logique libérale. Le débat doit continuer pour en déterminer les conditions.

Au-delà, notre rapport aux partis politiques doit être construit en ayant en tête deux séries de préoccupations :

dès maintenant, l‚indépendance des décisions et la séparation nette entre les responsabilités, qui seules permettront d‚éviter l‚instrumentalisation du mouvement social, doivent être préservées avec vigilance ; le refus d‚une division des tâches entre mouvement social et partis politiques implique que tous les acteurs de la lutte contre le néolibéralisme soient sur un pied d‚égalité pour se confronter sur le contenu des alternatives au néolibéralisme ;

à plus long terme, le refus de la notion de "débouché politique" implique que le processus de transformation sociale s‚inscrive dans une dynamique dialectique entre les contre-pouvoirs, qui naissent dans la société comme moyens de lutte, et les futures structures d’un pouvoir nouveau, dans lesquelles s‚investiront les travailleurs et les citoyens dans le cadre d‚une démocratie participative.

Il s’agit pour Attac de conserver sa spécificité d’association, cela n’empêchant pas que chacun puisse s’inscrire dans le processus politique de son choix. Mais le rapport au politique dépasse de beaucoup le simple rapport aux partis politiques car il concerne les liens entre les structures associatives, syndicales et autres d‚un côté, et toutes les formes institutionnelles que prend l‚exercice du pouvoir, qu‚il soit local ou plus global, de l‚autre. Il s’agit donc du double rapport entre les formes de la démocratie représentative avec celles de la démocratie participative d’une part et avec les organisations du mouvement social et citoyen d’autre part. Ce sont des questions complexes dont les réponses s’élaboreront progressivement, dans le débat, au fur et à mesure que les problèmes se poseront concrètement.

Nous avons là une sixième condition pour une nouvelle dynamique pour Attac : Attac ne doit pas être instrumentalisée pour telle ou telle opération politique, d’autant plus qu’elles risquent de se multiplier de toutes parts dans le contexte actuel, et l’association doit sans complexe se confronter aux partis politiques pour peser sur le contenu des politiques proposées à nos concitoyens.

Conclusion

Nous avons essayé dans ce texte d’indiquer quelles étaient, à notre avis, les conditions pour qu’Attac, et avec elle le mouvement altermondialiste, franchisse une nouvelle étape. Ce texte n’a évidemment pas pour ambition de résoudre tous les problèmes ni d’aborder toutes les questions. Nous avons voulu, par une démarche collective associant des membres fondateurs très divers et des élus membres actifs, montrer que, au-delà de nos différences, nous pouvions nous rejoindre sur le sens de notre engagement commun dans Attac et pour Attac, indiquant ainsi les voies d’un consensus possible dans l’association. Nous versons ce texte au débat ouvert dans toute l’association.


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