Le conflit du Larzac, archaïque ou moderne ?

Menacés d’expropriation depuis l’annonce par l’État, en octobre 1970, de sa volonté d’étendre le camp militaire présent sur la plateau, 103 paysans s’engagent à refuser de quitter leurs fermes. Sur cette terre rurale isolée débute alors une lutte sous le signe de la non-violence.

Voilà bien une concordance que l’actualité impose à l’attention. Les turbulences de la résistance à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, jusqu’à son tout récent succès, avec l’annonce par le gouvernement d’Edouard Philippe d’un renoncement à la réalisation de ce grand projet, ces turbulences et leur issue renvoient tout droit au précédent du Larzac, dans les années 1970. Je ne prétendrai certes pas à l’originalité en évoquant ce rapprochement. Non seulement les observateurs doués de quelque mémoire y ont été conduits spontanément, mais les acteurs, sur le terrain, s’y sont souvent référés. Au Larzac se développa en effet un mouvement de « résistance civile » – une formule qui remonte à l’américain Henry Thoreau, au mitan du XIXe siècle – un mouvement qui a marqué déjà profondément les consciences en obligeant l’Etat à renoncer à l’installation de vastes espaces militaires dans les Causses du sud de l’Aveyron.

Pierre-Marie Terral, mon invité ce matin, docteur de l’université Paul Valéry Montpellier III, y a consacré des travaux marqués par une pertinence et une sympathie suffisamment distanciées pour qu’ils répondent à tous les critères d’une historiographie rigoureuse. Les enjeux agricoles, écologiques, psychologiques, civiques et en définitive profondément politique, ont beaucoup de similitudes d’une époque à l’autre, ce qui n’exclut pas, bien sûr, de très notables différences, selon une dialectique à laquelle nous sommes ici, de samedi en samedi, fort continûment habitués.

Jean-Noël Jeanneney

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