Loi travail : les femmes passent (aussi) à la trappe

Emmanuel Macron l’a promis. Les femmes seront la grande cause nationale du quinquennat. Il est élu depuis à peine 150 jours et il a déjà réussi à se faire mentir 3 fois.
Une première fois avec la nomination du gouvernement et l’absence de Ministère dédié. Une deuxième fois cet été avec la baisse de 27% du budget du Secrétariat d’État à l’Égalité. Une troisième fois avec la Loi Travail n°2. 

Loi Travail et femmes, quel rapport ?
Lorsque l’on prend le temps de regarder les textes en détail, on s’aperçoit que plusieurs visent directement et spécifiquement les femmes. 
 
Les ordonnances prévoient de diviser par deux le plancher minimum de condamnation en cas de licenciement (interdit) d’une femme enceinte ou de retour de congé maternité. La maternité est pourtant une des principales causes de discrimination des femmes : grossesse, maternité et situation familiale représentent ensemble le premier motif de saisine du défenseur des droits.

De même pour le licenciement (interdit aussi) de salarié.e.s qui ont témoigné suite à du harcèlement ou à des violences sexuelles, les indemnisations plancher passent de 12 mois de salaires à 6 mois. 
 
Quel est le message que veut envoyer le gouvernement ? Quel est l’objectif en baissant les sanctions dans ces cas ?
 
L’inversion de la hiérarchie des normes renvoie à l’entreprise la définition de nombreux droits, et notamment les droits familiaux. Les congés enfants malades, pris en immense majorité par les femmes – que l’on doit essentiellement aux conventions collectives -, la rémunération à 100% du congé maternité comme son allongement,… tout est renvoyé à l’accord d’entreprise. Accord qui sera souvent négocié sans syndicat dans les plus petites entreprises, celles où sont concentrées les femmes. Avec tous les risques pour les travailleuses que cela comporte.
 
Le gouvernement ne s’arrête pas là. Il s’attaque aux outils pour négocier sur l’égalité professionnelle en entreprise. La loi prévoit aujourd’hui une négociation annuelle « égalité professionnelle qualité de vie au travail » et oblige l’entreprise à fournir des données aux salarié.e.s sur les inégalités professionnelles femmes - hommes. Ces données sont celles de l’ancien Rapport de Situation Comparée, issu de la Loi Roudy de 1983 et qui est désormais intégré dans la Base de Données Économiques et Sociales. Les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord ou plan d’action prévoyant des objectifs et des mesures pour atteindre l’égalité à partir d’un diagnostic chiffré peuvent être sanctionnées.
Désormais, les ordonnances permettent, par accord d’entreprise, de s’affranchir de cette négociation et de ses thèmes, de choisir les données à transmettre ou non, et de passer d’une négociation annuelle à une négociation quadriennale. Sans sanction bien sûr. Les inégalités de salaires s’élèvent toujours à 26% en moyenne, cela n’est pas prêt de bouger.
 
Exit aussi le droit d’expertise dédié à l’égalité femmes - hommes, gagné en 2015, qui aidait élu.e.s et syndicats à identifier et comprendre les sources des inégalités. Auparavant à charge de l’employeur, ce droit d’expertise devra désormais, comme les autres, être co-financé par le Comité d’entreprise…Qui du fait de son budget sans doute très limité, s’il peut financer des expertises, choisira probablement les expertises économiques.
 
Tout ceci sans parler des très nombreuses mesures générales des ordonnances qui pénaliseront plus particulièrement les femmes, plus souvent précaires, à la tête de familles monoparentales et prenant en charge la quasi-totalité des tâches domestiques et d’éducation des enfants. Donc plus vulnérables.
 
Emmanuel Macron, Marlène Schiappa, votre grande cause nationale commence mal. Cessez de brader les droits des femmes aux exigences du MEDEF, changez de cap, retirez ces ordonnances.

Les féministes l’exigeront dans la rue avec tou-te-s les salarié-e-s !