Le CSA a choisi son camp, communiqué de l’intersyndicale de France 3 Centre (automne 2006) Extrait de la Lettre d’Attac 45 n°39, automne 2006

La première attaque contre la liberté d’informer au sujet des OGM a eu lieu au printemps dernier. Voici à présent la deuxième.

En mai dernier, les journaux de France 3 Centre ont diffusé plusieurs reportages consacrés au procès en appel des 49 faucheurs d’OGM du Loiret à Orléans. Dans son compte-rendu, le rédacteur avait notamment souligné la façon dont le président de la cour d’appel avait mené les débats : coupant régulièrement la parole aux prévenus et commettant des erreurs de compréhension au sujet de la propagation des transgènes.

Des faits qui ont apparemment déplu aux magistrats. Quelques jours après cette diffusion, le procureur de la République d’Orléans ouvrait une enquête préliminaire pour "discrédit public jeté sur une procédure judiciaire". Avec, pour conséquences, l’intervention de policiers dans la station pour obtenir une copie des journaux. Puis ensuite, la convocation du rédacteur en chef et du rédacteur concerné à l’hôtel de police pour des interrogatoires où il leur sera demandé de "commenter" l’ensemble de ce qui a été dit à l’antenne.

En conclusion, de ce premier épisode, le parquet a finalement décidé de classer le dossier dans un souci de "conserver de bonnes relations avec la presse".

L’affaire aurait pu en rester là sans l’intervention du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel qui, le 6 septembre, envoie une mise en garde à Patrick de Carolis contre le non respect du cahier des charges de France Télévisions, lequel nous impose "une expression pluraliste des courants de pensée et des opinions."

Dans son courrier, le CSA reconnaît d’emblée qu’il n’a pas la compétence pour se prononcer sur le caractère diffamatoire des propos tenus à l’antenne.

Mais après avoir visionné "en son assemblée plénière", l’ensemble des éditions concernées, il relève une faute. Le 17 mai (et le 17 mai seulement) les tenants d’une position favorable aux OGM ne s’expriment pas. Et les propos concernant les magistrats ne sont pas " suffisamment étayés par des éléments objectifs".

Il est regrettable que le CSA se soit contenté de visionner les éditions sans demander d’explications au rédacteur en chef de France 3 Centre ni au rédacteur du reportage.

Ils lui auraient expliqué que les partisans des OGM et en particulier la société Monsanto (directement concernée par cette affaire) ont été sollicités pour s’exprimer pendant des mois tout au long de l’affaire du fauchage. Jusqu’au procès d’Orléans, ils avaient refusé toutes les demandes. Y compris les invitations à participer à des débats contradictoires dans des émissions de longue durée comme "Domaine Public".

Pour la première fois donc, les collaborateurs de Monsanto ont répondu à nos questions lors du procès les 15et 16 mai. Mais le CSA regrette qu’ils ne l’aient pas fait aussi le 17. Ce qui au regard du compte-rendu des débats de ce jour ne se justifiait pas éditorialement.

N’est-il pas étrange que le CSA pointe un problème de pluralisme dans une seule édition, au lieu de considérer l’ensemble du compte-rendu du procès des 15,16 et 17 mai ?

Quant aux propos concernant les erreurs du président de la cour d’appel pas " suffisamment étayés par des éléments objectifs", faut-il rappeler au CSA que les caméras de télévision ne filment pas les procès en direct ? Les journalistes ont-ils d’autres choix que de relater a posteriori ce à quoi ils assistent. Et ce à quoi tout le monde au cours de l’audience a pu assister d’ailleurs. Quels autres "éléments objectifs" peut-on apporter en cette matière, hormis la diffusion en plus des propos d’autres témoins de cette audience - ce qui a été fait dans le reportage du 17 mai ?

Faut-il rappeler que le CSA a pour mission de juger objectivement et sans prise de position extrême ? Peut-il donner des leçons en matière "d’expression pluraliste des courants de pensée et des opinions, " compte tenu du parcours politique très marqué de son président et de plusieurs de ses membres ?

Faut-il rappeler au CSA qu’en matière d’OGM comme sur le reste, les téléspectateurs citoyens sont en droit d’attendre une information indépendante plutôt qu’une propagande grossière – fût-elle élaborée et imposée par de très puissantes entreprises multinationales ?

La CGT
La CFDT
Le SJA-FO
Le SNJ