Orléans : la liberté d’expression se heurte à quelques problèmes techniques, par le Bureau d’attac45 (juin 2003) Extrait de la Lettre d’attac 45 n°20, juin 2003

Loin de nous l’idée de faire un procès d’intention à qui que ce soit. Et c’est des deux mains que nous pouvons applaudir quand la municipalité déclare vouloir favoriser un plus grand dynamisme du monde associatif orléanais. Très bien. Les choses avaient quand même plutôt mal commencé, quand à peine en place, la nouvelle équipe avait décidé de saborder le Forum des droits de l’homme, vitrine publique pour plus de 60 associations orléanaises, en écartant la coordinatrice de
l’événement quelques semaines avant l’édition 2002, et en recadrant les sujets évoqués lors des débats avant de finalement déclarer que le Forum n’existait plus...

La chose avait été difficile à digérer, mais, c’est bien connu, le monde associatif s’habitue à tout. Il en avait d’ailleurs été de même quand le fonctionnement de la Maison des Associations d’Orléans, à la fin de l’année dernière, avait été modifié : dorénavant, les demandes d’occupation de salles ne sont plus visées par le personnel de la structure (dont c’était pourtant le travail…), mais remontent jusqu’à l’adjoint concerné, qui délivre son assentiment avant de bien vouloir faire redescendre. Evidemment, c’est plus long, et on a bien l’impression que la confiance règne. Le plus gênant a tout de même été quand, pendant une courte période, les formulaires de réservation de salles se sont enrichis de la rubrique “ sujet de la réunion ” ; allait-ce devenir un critère de sélection ? Fort heureusement, probablement sous la protestation générale, la mention a bien vite disparu, mais la rigidité du contrôle tatillon est restée, ça peut servir.

De même, les espaces municipaux (salles de la médiathèque ou du Muséum) avaient toujours été mis à disposition gracieuse des associations pour l’organisation de conférences publiques. Y compris, évidemment, pour attac45. Que s’est-il donc passé pour que la municipalité nous réclame 250 euros pour tenir notre conférence du 26 mai dernier ? La décision a été maintenue malgré nosprotestations, et la confirmation finale donnée par téléphone quelques heures seulement avant la tenue de la conférence ; que nous avons donc dû annuler au dernier moment.

Les arguments de la Mairie ont été aussi divers que variés : attac45 n’est pas orléanaise (!), n’est pas culturelle (!!), et prêter la salle à tout le monde revient beaucoup trop cher à la mairie (!!!)… La
raison la plus convaincante a tout de même été émise par l’adjoint à la culture, lors d’une rencontre le 23 mai, et réitérée la semaine suivante lors d’interviews sur les radios locales : il n’y a aucune raison de donner une tribune aux associations qui contestent la politique de la mairie (comme si attac45, mouvement altermondialiste, pouvait se laisser classer dans l’opposition municipale !)

En clair, la Mairie choisit qui va ou ne va pas pouvoir tenir conférence sur Orléans. Idée : et si on faisait pareil avec le choix des ouvrages dans les bibliothèques ?

De nombreuses organisations, dont le Réseau forum des droits humains, se sont immédiatement manifestées pour nous assurer de leur soutien. Et de même, nombreux sont ceux qui se sont indignés de la brève parue dans la République du Centre du 28 mai, déclarant que “ la mairie d’Orléans dénonce l’attitude des membres de l’association attac 45, qui auraient essayé, lundi soir, de rentrer de force à l’auditorium de la médiathèque ”, mettant ainsi gravement en cause par une fausse information la cinquantaine de personnes (dont des journalistes locaux) qui n’avaient pas pu être averties de l’annulation de la conférence, et dont le tort principal est d’être restées à discuter de politique culturelle locale devant la médiathèque !

Par ailleurs, qui croire, quand le journaliste assure avoir scrupuleusement reproduit les propos tenus par l’attachée de presse du maire, alors que le directeur de cabinet du même dément formellement ? (1). Quelques jours plus tard, le même journal a publié un autre article, censé présenter “ l’autre version des faits ”, et de manière, il faut le dire, assez peu satisfaisante. Passons.

Depuis, rendez-vous a été pris avec le directeur de cabinet du maire, qui tenait visiblement à désamorcer la situation. Comme on pouvait s’en douter, cette rencontre, tenue le 17 mai, n’a rien apporté de nouveau : les propos de l’adjoint à la culture ont été discrètement désavoués, la mairie nie totalement avoir été à la source de l’article diffamatoire paru dans le journal ; et en ce qui concerne les prochaines conférences d’attac45, les choses devraient pouvoir s’arranger sans problème, puisque nous sommes entre gens raisonnables…

Et quant à la liberté associative orléanaise, quelle assurance avons-nous ? Eh bien, aucune. Et c’est d’autant plus grave que, si la restriction d’une des activités principales d’attac45, les conférences, constitue un problème sérieux pour nous, l’enjeu est beaucoup plus large : c’est celui de l’arbitraire mis au service de choix politiques qui tendent à faire régresser la liberté d’expression et l’activité citoyenne.

Le Bureau d’Attac 45


1 - Courageux mais pas téméraire, la République du Centre n’a pas cru bon, malgré notre demande, nous confirmer par écrit que les propos en question avaient bien été tenus…