Mauvais chiffres du chômage dans le Giennois : déclin ou opportunité pour changer de cap ? Par Philippe Lalik (nov. 2012)

Mauvais chiffres du chômage dans le Giennois : déclin ou opportunité pour changer de cap ?

Graphique : "les bassins d’emploi du Loiret dans le classement national établi en fonction du taux de chômage (2003-2012)"

Les médias nationaux (Le Monde, TF1) et régionaux (La République du Centre, Le Journal de Gien) se sont récemment préoccupés du sort du bassin d’emploi de Gien. C’est en effet là qu’on y a enregistré la plus forte aggravation du taux de chômage de toute la France métropolitaine depuis 2008. Si l’on classe les 304 bassins d’emploi hexagonaux selon le critère du taux de chômage, Gien occupait la 40ème place en 2003 avec un taux de chômage de 5,8%. Aujourd’hui, c’est à la 219ème place que pointe ce territoire (avec un taux de 10,8%) et non à la 85ème comme des élus locaux l’ont indiqué. Cette chute de 180 places est la plus spectaculaire de toute et c’est pour cette raison que de grands médias se sont intéressés à notre région. Dans le même temps, le voisin montargois est passé de la 174ème à la 265ème place, perdant donc 80 places.

Même si c’est l’ensemble des Français qui souffre, certains territoires sont plus mal lotis que d’autres. Il faut bien comprendre que la mondialisation ne creuse pas seulement les inégalités entre les individus et les classes sociales, mais aussi entre les territoires. Certains gagnent (pour combien de temps ?) tandis que d’autres perdent. Les mutations technologiques sont si rapides que les gagnants d’aujourd’hui ne sont pas certains de garder leur rang même dans un avenir proche. Le monde est devenu très instable et l’exemple de la société Nokia le rappelle de manière éclatante.

L’évolution du niveau de vie dans les chefs-lieux de canton du giennois montre que le déclassement du territoire n’existe pas du seul fait de l’évolution du taux de chômage et qu’il a débuté avant la crise de 2008. Quand on observe le classement des 36717 communes de France métropolitaine établi en fonction du niveau de vie moyen de leurs habitants, on se rend compte que Sully a perdu 6 105 places entre 2005 et 2010, Gien 5360, Briare 2285 et Chatillon sur Loire 1153. Seul Ouzouer sur Loire gagne 188 places sur cette période avec toutefois un recul de 847 places entre 2009 et 2010.

Face aux effets de la crise que nous vivons, le réflexe est de tenter de créer des emplois qui nous permettent d’être compétitifs dans la bataille économique mondialisée. Cette voie ne mène nulle part pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce que la recherche de gains de productivité dans une économie en stagnation ou en récession a des effets très néfastes sur l’emploi même. D’autre part, parce que la compétition entre les territoires menace de plus en plus la cohésion nationale. Ensuite, parce qu’en raison de la raréfaction des ressources énergétiques et minérales, nous manquerons dans les années et décennies qui viennent d’un tissu économique local adapté à nos besoins.

Les régions qui perdent, comme celles de Gien et de Montargis, auraient tout à gagner en engageant une réflexion sur la résilience des territoires, sur la mise en œuvre d’une économie locale qui ne serait pas destinée à lutter contre d’autres, mais qui aurait pour objectif la satisfaction des besoins de leur population. La résilience est la capacité d’un système à absorber un changement perturbant et à se réorganiser en intégrant ce changement, tout en conservant essentiellement la même fonction, la même structure, la même identité et les mêmes capacités de réaction.

Nier la gravité d’une crise qui ne fait que commencer ou espérer une reprise, rendue très hypothétique à cause de la baisse tendancielle du taux de croissance, ce n’est pas rendre service aux habitants de ces territoires. Espérer solutionner les problèmes avec les modes de pensée qui les ont engendrés conduit inévitablement à l’échec.

Le coup de projecteur des médias sur notre région doit être saisi comme une chance. Il ne doit pas demeurer sans lendemain, mais doit occasionner une vive réaction de l’ensemble des citoyens qui doivent se réapproprier leur avenir et celui de leurs enfants. Et si ces mauvais chiffres nous obligeaient à entrevoir de nouvelles solutions locales au désordre global ?

Philippe Lalik, Attac 45.

L’article de la République du Centre (mardi 30 octobre 2012)

 Pour aller plus loin : Pour en finir avec la compétitivité (rapport Attac/Copernic)