comment créer une polémique ? : cancer et eau du robinet !

, par attac92clamart





Comment créer une polémique qui ne sert pas les malades, sensés être au coeur des préocupations ? En s’appuyant sur la Science ! La question des médicaments, au coeur de notre corps et de notre eau, ainsi que des pesticides reste entière ... L’eau serait-elle la nouvelle poubelle de nos vies ? L’homéopathie et l’auriculothérapie ( correspondance entre l’oreille externe et les différents organes du corps : http://fr.wikipedia.org/wiki/Auriculothérapie) en seraient-elles le nouvel eldorado ?


Exemple en trois temps :

 

1/ l’interview dans Le Parisien du mardi 23 février 2009 : « malades du cancer, ne buvez pas l’eau du robinet »

2/ la réponse de Agir pour l’environnement 

3/ le décryptage sur eauxglacées.com

4/ Le Monde du 4/07/09 : résumé d’une polémique très tactique

 

 

 

1/ l’interview dans Le Parisien du mardi 23 février 2009 : « malades du cancer, ne buvez pas l’eau du robinet » : 

Le médecin David Servan-Schreiber lance aujourd’hui, associé au WWF, une campagne pour alerter sur la nocivité de l’eau du robinet. Il nous l’explique en exclusivité.

 

Le débat sur l’eau du robinet, souvent accusée d’être trop polluée ou d’avoir mauvais goût, est relancé par le docteur David Servan­Schreiber, auteur du best-seller « Anticancer » et responsable du site Guerir.Fr, et Bernard Cressens, directeur scientifique du WWF (Fonds mondial pour la nature).

Quel est l’objet de la campagne conjointe que vous lancez aujourd’hui ?

Bernard Cressens. Alerter l’opinion sur la présence anormale de résidus de pesticides et de nitrates dans nos rivières et nos nappes phréatiques et faire pression sur les politiques pour qu’ils prennent enfin le problème à bras-le-corps. Dans certaines régions, ces polluants se retrouvent dans l’eau du robinet et menacent la santé des jeunes enfants, des seniors mais aussi des personnes atteintes d’un cancer.

En quoi leur santé est-elle menacée ? 

David Servan-Schreiber. De nombreuses études montrent que les nitrates sont associés à une augmentation de la survenue de certains cancers (vessie, prostate, estomac). Quant aux pesticides, ils contribuent au changement de sexe des poissons dans les rivières. Ce sont des perturbateurs endocriniens qui peuvent conduire à une résistance aux traitements ou contribuer à la progression de la maladie.

Vous conseillez donc aux personnes atteintes d’un cancer de ne plus boire d’eau du robinet ? 

D.S-S. Nous ne voulons pas faire peur aux gens. Mais lorsqu’on a une santé fragile et que l’on vit dans une région où l’eau du robinet dépasse régulièrement les normes acceptables en termes de nitrates et de pesticides, le mieux est de ne pas boire l’eau du robinet, surtout si l’on a un cancer. On fait attention à l’eau que l’on donne aux bébés parce qu’on sait qu’ils ont une santé fragile. Eh bien, on doit tenir le même raisonnement pour les personnes malades ou âgées.

La qualité de l’eau potable est-elle à ce point catastrophique ? 

D.S-S. L’eau potable est globalement de bonne qualité en France, notamment dans les grandes villes qui sont dotées de stations d’épuration modernes et distribuent de l’eau « conforme ». Nous n’avons par exemple pas constaté de problème avec l’eau de Paris. Mais ce n’est pas le cas partout. En 2006, dans le département de l’Eure-et-Loir, 28% des stations de traitement ont distribué de l’eau potable avec des teneurs en nitrates supérieures au seuil réglementaire, ce qui concernait 49 080 personnes.

La situation s’est-elle aggravée ? 

B.C. Malheureusement, oui. On estime aujourd’hui que la majorité de nos rivières et la moitié de nos nappes phréatiques sont contaminées par des pesticides. En 1980, la Direction générale de la santé estimait que 1,8 million de Français ont été exposés à des eaux non conformes. En 2007, c’est plus de 5 millions de personnes qui ont eu de l’eau du robinet contenant plus de nitrates et de pesticides que les taux autorisés, mais pas de manière permanente.

D.S-S. Il ne faut pas négliger non plus la présence dans les cours d’eau et les nappes phréatiques de plus en plus de résidus de médicaments anticancéreux, d’antibiotiques, d’hormones contraceptives ou d’antidépresseurs qui se retrouvent dans le réseau d’eau potable. Même si les doses, au robinet, sont extrêmement faibles, ce mélange de substances pourrait être néfaste aux personnes fragiles, affectées d’un cancer.

Quelle mesure de précaution préconisez-vous ? 

D.S-S. Demandez à votre mairie de vous fournir les analyses d’eau de la commune. Et si les normes ne sont pas respectées, allez vous plaindre auprès de votre maire et privilégiez l’eau en bouteille. On peut aussi s’équiper de carafes à filtre ou installer un filtre plus sophistiqué directement à la sortie de son robinet, ce qui peut être efficace pour limiter les traces de pesticides et de nitrates.

 

2/ la réponse de Agir pour l’environnement

Le communiqué est en document-joint.

 

- Mercredi 24 juin 2009 -

COMMUNIQUE DE PRESSE

EAU ET CANCER : LES POUVOIRS

PUBLICS DOIVENT AGIR


Paris, le 24 juin 2009 : à l’occasion du lancement d’une campagne par le WWF et le médecin David Servan-Schreiber sur la nocivité de l’eau du robinet, les associations Agir pour l’environnement, l’ACME et France Nature Environnement souhaitent réagir sur les préconisations proposées.

La campagne lancée par le WWF et David Servan-Schreiber insiste sur la présence de polluants comme les résidus de pesticides et de nitrates dans les nappes phréatiques, qui se retrouvent dans l’eau du robinet et menacent la santé. Or si ces polluants sont en effet relevés dans l’eau du robinet, il est à noter que l’eau de source en bouteille est le plus souvent prélevée dans les mêmes nappes phréatiques, et peut elle aussi contenir un certain nombre de polluants. Deux études scientifiques de mars 20061 et de novembre 20082 soulèvent également la question de la migration du plastique de la bouteille vers l’eau, de substances nocives comme l’antimoine (un métal toxique retrouvé à des concentrations 95 à 165 fois plus élevées que dans l’eau du robinet) ou de perturbateurs endocriniens. Par ailleurs, la composition précise de l’emballage alimentaire de l’eau en bouteille n’est pas connue du fait du secret industriel : ni les consommateurs, ni l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments qui autorise pourtant la mise sur le marché des produits, n’ont l’information requise pour une consommation en toute transparence.

Il faut reconnaître que des progrès notables restent à faire dans certaines localités françaises, pour que l’eau potable (et pas seulement l’eau du robinet) soit d’une qualité irréprochable. Toutefois, le problème doit être vu dans son ensemble : l’eau en bouteille, loin d’offrir une alternative acceptable à l’eau du robinet, engendre 6 milliards de déchets de bouteilles plastiques dont la moitié, par défaut de recyclage, est brûlée dans des incinérateurs qui rejettent des substances polluantes dans l’atmosphère comme les dioxines. « Les citoyens ne doivent pas avoir à choisir entre pollution de l’eau et pollution de l’air et des sols : en croyant se préserver de toute pollution avec l’eau en bouteille, ils risquent d’engendrer une pollution pérenne liée aux déchets des bouteilles qui impactera également leur santé. », affirme Clara Osadtchy, coordinatrice des campagnes d’Agir pour l’environnement. « En matière de polluant, on ne trouve que ce que l’on cherche. Dans ce contexte, il importe de ne pas sur-marchandiser l’eau en incitant à consommer de l’eau et des emballages et de se battre pour améliorer la qualité des eaux. Si plus personne ne buvait l’eau de distribution publique, on pourrait craindre le pire pour la préservation de la qualité de la ressource » affirme Bruno Genty, vice-président de France Nature Environnement.

Les associations invitent donc les citoyens à solliciter massivement les pouvoirs publics locaux et nationaux pour que l’eau du robinet, publique et jusqu’à 100 fois moins chère que l’eau en bouteille, soit de bonne qualité partout en France.

Contacts presse :

Clara OSADTCHY– coordinatrice des campagnes d’Agir pour l’environnement

Tél 01 40 31 34 48/ 0671 89 49 73

Bruno GENTIL – Vice-Président de France Nature Environnement - Tél 06 83 09 75 79

Jean-Luc TOULY - 06 80 60 03 01

1 Shotyk, Krachler & Chen, « Contamination of Canadian and European bottled waters with antimony from PET containers » ; J.environ.Monit., 2006, 8, 288

2 Wagner & Oehlmann, “Endocrine disruptors in bottled mineral water : total estrogenic burden and migration from plastic bottles” ; Environ.Sci.Pollut.Res., 2008, publié en ligne : mars 2009

 www.agirpourlenvironnement.org

 

3/ le décryptage sur eauxglacées.com

 

Le débat sur la qualité de l’eau du robinet, souvent accusée d’être trop polluée ou d’avoir mauvais goût, est donc relancé par le docteur David Servan-Schreiber, auteur du best-seller « Anticancer », et responsable du site Guerir.Fr, et Bernard Cressens, directeur scientifique du WWF-France.

Le quotidien Le Parisien du 23 juin publie une interview croisée de David Servan Schreiber et Bernard Cressens, qui soulignent à juste titre qu’en dépit des assurances officielles la qualité de l’eau distribuée au robinet est très inégale, surtout si l’on examine des collectivités de taille différente.

Si les grandes collectivités ont les moyens d’investir dans des technologies de dépollution de plus en plus sophistiquées et dispendieuses, dans les petites collectivités, en revanche, des millions de français reçoivent chaque année une eau qui dépasse trop souvent les normes autorisées, pour ce qui concerne par exemple les pesticides.

Noter d’emblée pour mesurer toute la dimension de la polémique qui ne va pas manquer de se développer, et comme nous en informe une minuscule « brève » parue dans le quotidien Libération du 24 juin 2009, qu’en 2008 « le chiffre d’affaires français des pesticides est en hausse de 14%, à 2 milliards d’euros. Pour 2009, les professionnels s’attendent à une baisse des utilisations et à une stabilité du chiffre d’affaires ».

Vous avez dit « Grenelle » ?

Mais ce sont à l’évidence les recommandations du docteur Servan-Schreiber, qui invite notamment les malades du cancer à ne plus consommer l’eau du robinet, qui vont susciter la polémique.

Le débat est complexe et extrêmement sensible, comme le soulignait il y a quelques années déjà notre ami Gérard Borvon dans son excellent ouvrage "S-EAU-S l’eau en danger" :

"Informer sans affoler, tel est le problème auquel sont confrontées les associations de consommateurs et de protection de l’environnement. Leur objectif n’est pas de développer vis à vis de l’eau du robinet un dégoût tel que l’idée même d’en améliorer la qualité et de pouvoir à nouveau l’utiliser pour l’alimentation soit considérée comme une utopie."

Lire : "Marchands, Charlatans et Gourous de l’eau".


On notera de plus, ce qui n’est pas de nature à calmer le jeu, que l’Institut national de santé et de veille sanitaire (INVS), organisait justement la veille un colloque dédié aux limites de la surveillance en santé environnementale..., "mettant en lumière le rôle de la surveillance en santé environnementale, mais aussi ses limites et les freins techniques, financiers et juridiques à son développement, dans un contexte de préoccupations sociétales fortes."

Et que nous racontaient les « experts » patentés qui participaient à ce fameux colloque ?

« Si l’on ne peut toujours pas prouver aujourd’hui l’effet sanitaire des pesticides, c’est parce qu’aucune étude de grande ampleur n’a été conduite sur ce sujet », fait remarquer Daniel Eilstein, chercheur à l’INVS, co-organisateur du colloque.

(…)

« La surveillance de la santé environnementale se heurte à de nombreuses difficultés. Il y a une rareté des données d’expositions à des facteurs environnementaux, note Jérome Lozach, de l’agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFSSET). Les données sont parcellaires dans le temps et dans l’espace. Certains thèmes émergents, comme les pesticides ou le bruit, ne sont pas suffisamment couverts aujourd’hui. Cela conduit les chercheurs à faire de la modélisation ou de l’extrapolation. » 
 

Lire : 

Surveillance en santé environnementale : mieux comprendre

Bulletin épidémiologique hebdomadaire n° 27-28, 22 juin 2009

Le dossier (à charge) du docteur Servan Schreiber

Pour mieux comprendre une position qui ne va pas manquer de faire des vagues, consulter le dossier mis en ligne sur le site « Guérir.fr », intitulé « L’eau potable et le cancer ».

On y découvrira notamment l’impressionnant comité scientifique qui soutient la démarche.

Rivières de médicaments

Pour sa part le magazine « Global Mag » d’Arte diffusait le 19 juin 2009 une enquête dédiée aux inquiétudes croissantes que suscite la présence de résidus médicamenteux dans l’eau :

« Anxiolytiques, antibiotiques, contraceptifs… Les médicaments passent dans nos urines, partent dans les égoûts et les stations d’épuration n’y peuvent rien ! Jusqu’à 90% des médicaments résistent au traitement. Résultat : bourrés d’hormones, les poissons de nos rivières se féminisent. Un phénomène qui met en danger la reproduction et la survie d’espèces entières. Pour l’homme aussi les conséquences sont inquiétantes, puisque c’est aussi dans les rivières que nous puisons l’eau du robinet. Certaines molécules bouclent la boucle et reviennent dans nos organismes par l’eau du robinet. »

Voir :

Rivières de médicaments

Voir aussi : 

Les 29, 30 et 31 octobre 2007 s’est tenu à Pau le 7ème congrès international GRUTTEE organisé par Le Laboratoire de Chimie Analytique Bio Inorganique et Environnement (LCABIE) de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour et la ville de Pau.

Voir le compte-rendu

Ce congrès a rendu compte des travaux engagés dans le cadre du programme de recherche européen Knappe (Knowledge and Need Assessment on Pharmaceutical Products in Environmental Waters)

Voir le programme Knappe

 

Lire aussi : 

Qualité de l’eau : le dossier d’Eaux glacées

Les eaux glacées du calcul égoïste, 13 mars 2009


4/ Le Monde du 4/07/09 : résumé d’une polémique très tactique

extrait de l’article en document joint :

"L’Académie de médecine ne supporte plus cette "tactique qui consiste à lancer une alerte, arguer du principe de précaution et évincer la démarche scientifique. C’est la porte ouverte à n’importe quoi", s’inquiètent les académiciens. Ces derniers avaient déjà contesté les mises en garde sur la dangerosité de certains cosmétiques pour bébés et les risques liés aux antennes de téléphonie mobile."