TSCG / Interpellation des Élus : réponse écrite de Jean-Marc Germain, député PS du 92

, par attac92clamart

Jean-Marc Germain, député élu sur la circonscription de Clamart, Chatillon, Le Plessis-Robinson, a répondu par écrit au courrier d’interpellation qu’ATTAC 92 lui a fait parvenir. Un courrier du même type lui avait été adressé par Gérard Aubineau, élu PCF au conseil Municipal de Clamart, en tant que Front de Gauche, membre du Collectif Clamartois contre le TSCG.

 

La réponse de JM Germain est datée du jour du scrutin à l’Assemblée Nationale, elle se compose d’un courrier qui répond à un autre et de son intervention en séance ce même jour.

 

Ils sont en pdf, en document-joint

 

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courrier de réponse au courrier d’ATTAC 92

 

Paris, le 9 octobre 2012

Monsieur,

Dans un courrier de septembre 2012, vous m’avez fait connaitre votre souhait de voir rejeté par le Parlement le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), c’est-à-dire le Pacte
budgétaire européen. Je vous en remercie.

Pour ma part, je suis favorable à la ratification de ce traité, au nom même des engagements que nous avons pris face aux Français.

Le Président de la République a tenu ses promesses. Comme il s’y était engagé, la politique européenne a été réorientée depuis le 6 mai dernier.

Nous avions demandé que des outils de régulation soient mis en œuvre, nous les avons obtenus. Ainsi, une taxe sur les transactions financières va être instaurée. Le mécanisme de supervision bancaire encadrera le secteur financier et édictera des règles prudentielles qui ont tant manqué avant le déclenchement de la crise.

Nous refusions que l’Union européenne soit un simple gardien du temple de la discipline budgétaire, nous avons obtenu un « pacte de croissance » de 240 milliards d’euros. La Banque européenne d’investissement va être recapitalisée et des « project bonds » permettront de financer des grands projets, notamment d’infrastructure.

Par ailleurs, je réfute l’idée selon laquelle ce traité nous enfermerait dans une politique d’austérité assortie de sanctions disproportionnées et attentatoires à notre souveraineté nationale. Le TSCG laisse tout d’abord la possibilité de mettre en œuvre une politique budgétaire expansive. Ensuite, le Traité prend désormais en compte dans le calcul du déficit les dépenses effectuées par l’Etat en période de baisse de l’activité économique. Respecter 0,5% de « déficit structurel » ne signifie donc pas l’obligation d’atteindre 0,5% de déficit nominal. L’objectif reste le respect de la règle des 3% de déficit nominal.

De plus, le concept de « circonstances exceptionnelles » offre une soupape de sécurité qui permet de déroger aux règles du Traité, le cas échéant.

Enfin, le Traité ne consacre pas, en matière de sanctions financières, une automaticité pure et simple des procédures. Les pouvoirs de sanctions de la Cour de justice de l’Union européenne ne s’appliqueront qu’en de mauvaise transposition de la règle d’équilibre budgétaire en droit interne. Ce contrôle juridictionnel ne porte en aucun cas sur le respect annuel par la France des différentes dispositions sur l’état des finances publiques contenues dans le Traité. Seule la Commission européenne pourra, en cas de dérapage des comptes publics, infliger des sanctions financières à l’état-membre concerné. Néanmoins, les parlements nationaux restent entièrement souverains en matière budgétaire puisqu’ils ne peuvent être contraints par la Commission européenne à adopter un budget différent.

Je n’oublie pas non plus le contexte dans lequel la France évolue à Bruxelles. La très grande majorité de nos partenaires européens sont issus de gouvernements conservateurs. Il y a quelques mois encore, la plupart des Etats membres n’envisageaient pas la réorientation de la politique européenne obtenue par la France. C’est grâce à la volonté du Président de la République, à la force du 6 mai 2012, qu’aujourd’hui le « Pacte budgétaire » a été équilibré par un « Pacte de croissance ». La France ne peut se permettre de ratifier le Traité sans le soutien plein et entier des parlementaires. Notre pays subirait une perte de crédibilité qui laisserait aux libéraux et conservateurs le loisir d’imposer leurs vues.

Le TSCG n’est qu’une étape. La volonté du président de la République, du gouvernement et de la majorité est d’œuvrer, tout au long du quinquennat, à la réorientation de la politique européenne. Qu’il s’agisse de la fiscalité, de la convergence sociale, d’environnement, des règles de concurrence ou encore de la politique économique et budgétaire, les chantiers sont nombreux. Le président de la République a besoin d’un soutien massif pour les engager.

L’Europe est complexe. C’est un équilibre entre des peuples et des Etats aux cultures politiques et aux aspirations souvent différentes. C’est pourquoi je crois que chaque avancée prépare la suivante et que nous n’avons surtout pas besoin d’un coup d’arrêt.

La réorientation de l’Union européenne a débuté. Elle devra se prolonger dans les années qui viennent. Le gouvernement et toute la majorité y seront très attentifs.

Enfin, veuillez trouver ci-jointe mon intervention dans l’Hémicycle à ce sujet.

Je vous prie de recevoir, monsieur, mes salutations les meilleures.

Jean-Marc Germain.
 

 

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Intervention à l’Assemblée Nationale le 9 octobre 2012

 

Intervention de Jean-Marc Germain,

lors du débat sur la déclaration du Gouvernement, en application de l’article 50-1 de la Constitution, sur les nouvelles perspectives européennes

Le 2 octobre 2012

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, en regardant tout à l’heure M.Jacob et M. Borloo brandir le traité et dresser une comptabilité dérisoire de ses mots et de ses virgules, je repensais à cette phrase de Jaurès : « Quand les hommes ne peuvent plus changer les choses, ils changent les mots. »

François Hollande, lui, a choisi de changer les choses.

Et les choses ont changé, le 28 juin.

Nous réclamions depuis vingt ans avec Jacques Delors un programme de grands travaux. C’est fait avec le paquet croissance de 120 milliards d’euros, et c’est important pour soutenir la croissance de l’Europe et muscler sa compétitivité.

Nous réclamions depuis quinze ans une taxe sur les transactions financières. C’est fait, et c’est important pour remettre la finance au service de l’économie et pour relancer la croissance sans endettement.

Nous réclamions depuis cinq ans une régulation bancaire et une intervention de la BCE pour contrer la spéculation sur les dettes souveraines. C’est fait et c’est important pour préserver l’euro et pour rouvrir le robinet du crédit.

Qui peut, au vu de tout cela, nier sérieusement que l’Europe a profondément changé de direction depuis trois mois ? La vérité, c’est que François Hollande a réussi, là où Nicolas Sarkozy avait échoué, pour ne pas dire fauté. La vérité, c’est qu’après des années de chacun pour soi et d’austérité généralisée, le balancier de l’Europe est revenu du côté de la solidarité et de la croissance.

C’est pour cela que je soutiens, monsieur le ministre, le paquet européen proposé par le Président de la République. Je le soutiens et j’en voterai l’ensemble des dispositions d’application, traité compris.

Mon oui n’est d’ailleurs pas un oui qui veut dire non, ni un non qui veut dire oui. C’est un oui qui veut dire oui !

Je vous le dis, si je pensais ce traité mauvais pour notre pays, je ne le voterais pas, quelles que soient les avancées obtenues. Mais il n’en est rien.

Ce n’est certainement pas le carcan dont parlent certains. Il n’entraîne pas de transfert de souveraineté – le Conseil constitutionnel l’a confirmé dans sa décision du 9 août 2012 ; il n’implique aucune règle contraignante dans la Constitution – et il n’y en aura pas ; enfin, les parlements nationaux conservent leurs prérogatives budgétaires ainsi que le prévoit explicitement le paragraphe 2 de l’article 3 du traité, que M. Carrez a omis de lire tout à l’heure.

Le traité n’entrave pas davantage notre économie. Je le dis d’autant plus que, étant économiste de formation et d’obédience plutôt keynésienne, j’y attache une importance toute particulière. Je dirai même que le fait de consacrer le solde structurel comme objectif est un progrès. Cela signifie que le traité reconnaît la possibilité d’utiliser la politique budgétaire pour soutenir l’économie dans les périodes de crise économique.

Il conviendra, bien sûr, d’être vigilant sur la question du calcul du solde structurel, qui, du coup, revêt une importance particulière.

Quant aux sanctions éventuelles, j’observe qu’elles sont, somme toute, modiques : 0,1 % du PIB. Un État qui voudrait s’affranchir pour telle ou telle raison de l’objectif de retour structurel à l’équilibre pourrait le faire sans dommage ni pour sa croissance ni pour sa richesse nationale.

Règle souple, sanction faible, on voit bien que l’enjeu de l’Europe est ailleurs. Il est dans ce qui a été obtenu pour la croissance, dans ce qui reste à obtenir pour l’Europe. Aussi mon vote est-il autant un vote de reconnaissance de l’acquis, que d’exigence pour le futur.

Je voudrais insister ici sur la nouvelle avancée qui me semble des plus essentielles. C’est la question du juste échange, l’idée que l’Europe ne peut plus être désormais le seul continent au monde ouvert à tout vent, l’idée que l’Europe doit protéger nos entreprises et nos savoir-faire, imposer la réciprocité, exiger le respect des normes sociales et environnementales et, pour les pays qui ne le font pas, appliquer des droits de douane plus élevés.

Mes chers collègues, l’Europe Sarkozy-Merkel, c’était du sang et des larmes.

L’Europe de François Hollande et Jean-Marc Ayrault, c’est de la sueur, des emplois et de la justice. C’est cette Europe-là que nous soutenons, monsieur le ministre, en approuvant aujourd’hui votre politique. Nous avons toujours été là pour faire avancer l’Europe, nous le sommes et nous le serons !