Réunion Attac Paris-Centre le 14/02/2017

Compte rendu de la réunion ATTAC Paris-Centre le 14 février 2017

CR par Jean-François.

Yves et Isabelle, 2 nouveaux adhérents, sont venus nous présenter leur réflexion, afin de lancer le débat sur la « crise du politique » et la démarche qu’Attac pourrait amorcer face à ce phénomène. (Voir texte préalable)

Yves + Isabelle : Pour présenter notre réflexion, on pourrait répondre à la question : « Pourquoi est on venu chez Attac ? ». Pour faire de la politique autrement, nous étions à la recherche d’un lieu qui soit différent d’un parti politique. Après une expérience à « Nouvelle Donne », qui, malgré des aspects positifs, nous a déçu, car il y avait une certaine ambiguïté sur la ligne politique et un flou au plan idéologique, il s’agissait finalement d’un parti sans le nom, nous nous tournons aujourd’hui vers Attac, toujours à la recherche d’un lieu où faire de la politique autrement.

Tout le monde parle de « crise du politique », c’est devenu un terme « tarte à la crème », et nous pensons qu’il faut aller plus loin aujourd’hui que ce simple constat, notamment après l’expérience de Nuit Debout. Après Nuit Debout, c’est comme si le thème de la « crise de la politique » était resté en suspens. Si on tire un enseignement de Nuit Debout : la réflexion était là, mais avec la pratique de « l’horizontalité », elle n’a pas été transformée en action véritable. L’idée était qu’en pratiquant une prise de décision politique radicalement horizontale, cela suffirait à fragiliser les structures verticales en place, et à renverser le système, mais cela n’est pas vraiment arrivé. D’où notre idée qu’aujourd’hui, Attac devrait monter en puissance sur cette question : « comment attaquer les systèmes politiques établis ». Pour étayer cette réflexion, nous avons cherché à définir « le politique », à la différence de « la politique ». Notre proposition de définition : comment est organisé l’exercice du pouvoir, avec les notions de désignation, de délégation, et aussi un aspect important : l’expression d’une sanction possible si la délégation est trahie. La question est : peut on avoir une démarche militante en faisant l’impasse sur les procédés démocratiques en place dans la société aujourd’hui.

Cette « crise du politique » est évoquée et invoquée par toute la sphère des médias et des personnalités politiques, mais aucune réponse n’est proposée sinon : « qu’est-ce qu’on peut faire pour que… rien ne change. »

Un aspect important de cette « crise du politique » se trouve dans l’usage du numérique qui a pris une place considérable. Il faut l’envisager avec ses dangers (fausses nouvelles, propagande…), mais aussi ses aspects positifs : la résistance politique peut s’appuyer sur ces nouveaux outils de communication.

Enfin, il est à noter qu’une partie importante de la population exprime désormais de la méfiance voire un rejet de la politique, ce qui est extrêmement inquiétant, et est propice aux dérives autoritaires. Cela peut s’expliquer par la fragmentation de la société : une partie de plus en plus importante de la population est reléguée en dehors (banlieues, minorités, etc.) et il n’y a plus un ensemble de citoyens, mais une fragmentation d’ensembles désunis. Cette situation s’aggrave considérablement ces derniers temps, et l’édifice se fissure aujourd’hui, suite à une conjonction de conjonctures. Cette situation est nouvelle, et face à cela , il ne suffit pas d ‘élaborer des idées, il faut aussi mettre en place de l’action. Les idées, la réflexion, ne sont utiles que si elles aboutissent à une mise en application. C’est pourquoi, selon nous, Attac doit s’atteler à cette question dans le contexte actuel, afin que soient portés au pouvoir des personnes qui appliquent une politique qui corresponde aux idées qu’Attac défend. Cela peut paraître ambitieux et prétentieux, mais cela nous paraît urgent. Attention cependant à ne pas s’installer dans l’ambiguïté : il ne s’agit pas d’entrer dans le jeu politique, mais de donner du grain à moudre au débat et à la vie politiques.

Comme nous l’avons dit, il y a aujourd’hui, une partie entière de la population qui n’attend plus rien de la politique, et qui a décidé de ne pas aller voter ou de voter FN. Comment les sensibiliser pour les convaincre à nouveau qu’ils ont un rôle à jouer ? Nous posons cette question : Attac pourrait il envisager des actions qui soient, en quelque sorte, une « ré-éducation » (dans le bon sens du terme !) de cette énorme masse de la population ?

Il y a aussi un groupe qui a décidé de ne pas voter par refus de toute verticalité. C’est dans ce groupe que se trouve sans doute le germe de la politique de demain. Leur refus de la verticalité les condamne à ne plus participer au système actuel. Peut on imaginer un système qui permette que ce groupe ait une influence sur le pouvoir en place ? Imaginer, en quelque sorte, une verticalité… qui passe dans les 2 sens, du haut vers le bas mais aussi du bas vers le haut ? Le but étant que l’élu soit d’avantage le représentant de sa base.

Edwige : Nuit Debout n’est pas vraiment terminé, même s’il y a eu un clash au moment de la prise de décision sur la présence ou non de ND à la fête de l’Huma. Après cela, ça s’est égrené en plein de petits groupes encore très actifs. Il y a 5 ou 6 commissions qui fonctionnent toujours, notamment celle qui ré-écrit la constitution, qui a fourni un énorme travail . Les nouvelles idées qu’on voit apparaître dans la campagne viennent souvent de là, comme le « salaire universel » qui est une notion qui a été très débattue à ND. Par ailleurs, il y a un groupe qui s’est formé à Attac, qui réunit des personnalités d’Attac comme D. Pilhon et A. coupé, mais aussi des syndicalistes, des verts, des communistes, des militants de base, et qui va dans le sens de ce que vous (Yves et Isabelle) proposez. Le groupe s’appelle « Notre espace commun » et le slogan est « nos droits contre leurs privilèges ». 2 groupes de travail ont déjà fait une 1ère réunion, et la question a été abordée par D. Pilhon à la dernière CNCL.

Aymard : En amont de ce groupe il y a une plateforme qui s’était constituée, visible sur internet sur le site :syndicollectif.fr. Les questions abordées : droits sociaux et fondamentaux, droit à la richesse, transition écologique, discriminations, liberté publiques… Et il y aura un site qui sera créé pour « Espace commun ». Il y a aussi une commission « démocratie » qui doit se créer chez Attac (actuellement un groupe de travail).
Après le Brexit et l’élection de Trump, cette question est effectivement très importante mais aussi dangereuse : est ce qu’on ne se bat pas avec un lance pierre contre une bombe atomique ? Cette partie de la population qui n’avait pas été influencée par les idées du FN jusqu’ici l’est aujourd’hui : la question est « comment faire pour qu’elle ne le soit pas ? ».

Hélène : Un bon exemple, j’étais récemment à St Lô, où D. Pilhon d’Attac était venu faire une conférence sur l’évasion fiscale quelque temps auparavant, et j’ai été étonnée à quel point cela avait marqué les esprits, y compris dans une frange de la population qui aurait aussi pu être influencée par les idées du FN. Il y a donc des thèmes fédérateurs comme le nucléaire, ou les multinationales, qui permettent de toucher et fédérer, y compris dans ce groupe de population. Souvenons nous par exemple que la FNSEA avait rallié l’opposition au TAFTA ! Il est donc possible de rallier à nos idées des personnes très éloignées de notre conception générale, sur certains sujets précis. En isolant un sujet, cela est possible.

Danièle : En parlant de cela, il y a certains sujets qui sont tabous à Attac, comme le nucléaire ou le revenu universel…

Aymard : pas du tout, tous les sujets peuvent être discutés. La question du nucléaire, du revenu universel sont abordées, discutées, sur la liste « démocratie » en particulier ; il faut être sur les bonnes listes. La « liste des listes » va être revue car trop de listes… La « liste des listes » est visible sur le site d’Attac, sur la page « sympa ». Pour s’inscrire, il suffit d’envoyer un message à equipe@attac.org

Isabelle : Tout cela me conforte dans mon idée de rejoindre Attac, où il me semble que toutes les « pathologies » sont mises sur le tapis et discutées… Il y a aujourd’hui une effervescence de mouvements revendicatifs, on aurait pu faire un autre texte qui dirait que tous ces thèmes (nucléaire, immigration, etc.) sont tous des moyens de faire de la politique, mais l’idée est plutôt de dire que cette question de « la politique » est une question en soi ; tous les autres sujets sont des conséquences du politique. On veut donc s’attaquer à la racine du problème, même si « les petits ruisseaux font les grandes rivières »…

Marie-Christine : Il y a de nombreux débats et livres en ce moment, c’est une vraie ruche. Cette question du politique rejoint celle de l’humain donc de l ‘éthique. C’est un débat hautement intellectuel.

Serge : Avant 2005, il y a eu une section de militants d’Attac qui ont représenté les idées d’Attac à l’Assemblée Européenne, au Sénat et à l’Assemblée Nationale. Ensuite, ça s’est disjoint car les adhérents socialistes ont été en désaccord et ont démissionné.
Ce n’est pas qu’une « crise du politique », c’est une « crise du programme ». Attac s’attaque aux paradis fiscaux, au capitalisme, au libéralisme économique, et en faisant cela agit contre les dérives d’un système, mais il faudrait donc s’attaquer au système lui-même, c’est là qu’est la question : ce n’est pas une question de choix du mode d’action, mais du sujet de l’action.

Isabelle : Le fait que Trump ait été élu avec 3 M d ‘électeurs de moins que Clinton a remis en question le mode de désignation des élus…

Marif : La crise dépasse le cadre franco-français, il y aune remise en cause du système de représentation dans toute l’Europe ; on y retrouve la question de la verticalité, mais aussi celle du contrôle, de la vérification de ce que font les élus. Il y a aussi un problème générationnel : les moins de 40 ans se posent ces questions autrement. Ils ont les même buts, mais pas les même façons de faire. Il faut être à l’écoute de leurs références, façons de faire,etc. Il y a beaucoup de réflexions aujourd’hui sur ces questions (voir David Graeber par exemple…), il faut y prêter attention . Enfin, si on observe l’Histoire, tous ces sujets ne sont pas nouveaux. Au 18ème siècle, les clubs, les sections, etc. se sont toujours posé des questions sur la verticalité, les systèmes représentatifs, la corruption... Se souvenir que le comité de salut Public avait décidé pour cela d’être renouvelé tous les mois. Mêmes questions soulevées pendant la Commune : c’est important de regarder l’Histoire.
Qui vote FN ? Un groupe d’adhérents FN « classiques » qui veulent un système autoritaire, mais aussi beaucoup de personnes désabusées de la politique qui veulent renverser la table. C’est un vote d’opposition, suite à une détresse sociale (Le Nord, Florange, etc .) Ce vote n’a rien à faire de tout argumentaire. C’est par l’action qu’on peut contrer ce vote FN. C’est la position de Mélenchon qui a cherché à récupérer ce vote protestataire. Mais on peut aussi mener des actions concrètes au sein des villes où le FN est aux affaires. Car ils n’ont pas vraiment de programme, mènent des politiques différentes au nord et au Sud, mettent en avant des jeunes sans expérience qui montent très vite dans la hiérarchie…

Isabelle : La question que nous débattons rejoint celle de la VIème république. Je pense par exemple que l’interdiction du cumul des mandats est une fausse solution ; Pourquoi, C’est un détail, il faut s’attaquer au problème central : celui de la représentativité, et du mode de sanction. La classe politique est de + en + détachée de la population.

Yves : Concernant la question éthique/politique, le mensonge a fini par être admis aujourd’hui comme une « méthode » politique. La différence entre éthique et politique a évoluée. Ce qu’on peut espérer d’une VIème république, ce n’est pas un « replâtrage », ce sont de nouvelles bases. Il faudrait introduire toutes les nouvelles méthodes qui sont en germe aujourd’hui, toutes ces nouvelles façons pour les citoyens d’intervenir. Attac devrait s’impliquer dans la définition de ces nouvelles formes.

Edwige : J’ai assisté récemment à une réunion d’un collectif de jeunes nommé « les ingouvernables ». Les prises de paroles, parfois contradictoires, étaient très pacifiées, et sans modérateur, c’était très impressionnant ! Il y a plein de groupes qui se réunissent, d’associations, en particulier en banlieue, qu’il ne faut pas négliger. Je ne pense pas qu’il faille les « former », mais plutôt laisser émerger les nouvelles idées, les nouvelles méthodes ; Il y a plein de jeunes, de trentenaires, qui savent faire se forment et sont très politisés.

Hélène : Concernant la VIème République, Eva joly explique très bien que ce n’est pas la justice qui a le dernier mot sur les questions d’évasion fiscale mais le président de la République, grâce au verrou de Bercy. C’est un exemple concret très parlant de la nécessité de changer le système.

Isabelle : Miguel Benassayag disait que la France regorge de milliers d’initiatives dont les médias ne parlent jamais. La radio/TV ne parle que des candidats, mais pas des autres initiatives. Concernant le revenu universel, c’est un vrai sujet, les listes ne suffisent pas à en discuter, il faudrait aussi organiser des débats, ce serait bien que le CL se penche sur la question, organise une rencontre…

En conclusion, Isabelle propose de faire un tour des initiatives et travaux qui se sont fait jusqu’ici sur la question de la VIème République.

CNCL
La prochaine CNCL a lieu les 112-12 février. Danièle propose de mettre au vote la proposition d’un atelier de travail sur l’immigration pour la suivante. Le CL vote oui à l’unanimité.

Blackstone 
JF expose les dernières décisions du « Groupe des 24 000 » : poursuivre l’action contre Blackstone, écrire une lettre à Anne Hidalgo, intervenir dans les Comités de Quartier pour informer la population au delà des militants, réfléchir à une action ludique et positive à l’occasion de l’inauguration de la crèche qui va avoir lieu prochainement dans le bâtiment, bien que les travaux ne soient pas terminés. Edition d’un autocollant. Le principe de la participation financière du CL à l’édition, en partage avec les autres structures qui forment le « Groupe des 24 000 », de l’autocollant, est voté, sous réserve de connaître la somme exacte.

CETA
C’est la dernière ligne droite. Conférence-Débat à la Mairie du 10ème organisée par Attac 10ème. Tous à Strasbourg (départ en car le 14 février, voir le site d’Attac).

La Poste
Un collectif de défense de ce service public s’est formé, conférence de presse le 29 février dans un bureau de Poste. Un site internet va être créé qui va répertorier l’ensemble des bureaux qui sont supprimés. On remplace les bureaux par des Franprix où les colis peuvent être retirés ! Le but est de réduire l’activité aux colis, mais surtout à l’activité bancaire, en développant les agences surtout là où « ça paye », où il y a de l’argent, etc. Site à consulter : collectifposte.org

 JF signale qu ‘à l’initiative des frères Boquet et des députés du front de gauche, un vœu a été voté à l’Assemblée nationale pour l’organisation d’une « COP fiscale », sommet international sur l’évasion fiscale. Il propose également de rendre compte prochainement avec Minh de sa lecture du livre « La siliconisation du monde - l’irrésistible expansion du libéralisme numérique »

 Antoine propose d’inviter Thierry Brugvin pour parler de son livre : "Etre humain en système capitaliste - L’impact psychosociologique du néolibéralisme", analyse du libéralisme sous l’angle psychologique qui lui semble intéressant . Il a la possibilité de le faire venir.

 Aymard propose également la venue possible de Jean-Claude Chailley pour qu’il présente le « Manifeste pour un service public du XXIème siècle »