Profession : Haut Commissaire à la tromperie sociale

vendredi 22 mars 2019, par Jean-Marie Harribey

Jean-Marie Harribey, membre d’Attac et du collectif d’animation des Économistes atterrés, dénonce les entourloupes de Jean-Paul Delevoye, Haut Commissaire à la réforme des retraites, prononcées ce jeudi 21 mars sur l’antenne de France Inter.

Le Haut Commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, était invité ce matin 21 mars sur France Inter. Il a lancé le printemps des entourloupes en fleurs. Pendant la semaine précédente, la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, avait laissé entendre que le gouvernement réfléchissait pour reculer à nouveau l’âge légal de départ à la retraite au-delà de 62 ans. Et elle avait argué que « je suis médecin, je vois que la durée de vie augmente d’année en année », affirmation fausse puisque l’espérance de vie plafonne depuis quelques années.

L’inquiétude montant sur les retraites, Delevoye se devait de brouiller les cartes. Il a assez bien réussi. En effet, il a juré ses grands dieux que l’âge où l’on pourrait faire valoir ses droits à la retraite resterait fixé à 62 ans. Mais il a ajouté aussitôt deux pièces dans la machine à baisser les pensions ou à faire travailler plus longtemps.

Premièrement, il a confirmé que le futur système à points inciterait à travailler beaucoup plus tard que 62 ans. Le faible nombre de points lorsqu’on aura eu une carrière à trous (temps partiel et maternité pour les femmes, chômage…) et/ou à faibles salaires pourrait être compensé par des points supplémentaires en travaillant jusqu’à extinction des forces. Il s’ensuit que le principe de « la liberté pour chacun de choisir » le moment où il part en retraite, décliné à l’envi par le Haut Commissaire, est un déguisement de l’obligation pour beaucoup de travailleurs et surtout de travailleuses à travailler toujours plus longtemps pour avoir une pension décente, en susurrant que l’âge qui permet d’équilibrer le système de retraite est de 63 ans ou 63 ans et demi.

Deuxièmement – et là Le Haut Commissaire a atteint des hauteurs dignes de son titre–, pour éteindre le début d’incendie allumé par la ministre de la santé, il a benoîtement expliqué qu’il existait un second sujet, très différent de celui des retraites, comme l’avait expliqué la veille le Premier ministre Édouard Philippe, la dépendance, qui est « un sujet de santé » et non pas de retraite. Mais à la question de savoir comment serait financée la prise en charge de la dépendance, sous-entendu souvent des personnes âgées, il a répondu : il y a trois moyens. Premier moyen : augmenter la CSG ; mais comme le président de la République exclut toute augmentation des impôts, c’est peu probable. Deuxième moyen : un jour travaillé de plus gratuitement, comme Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, l’avait fait pour le lundi de Pentecôte ; mais ce fut un coup d’épée dans l’eau et nous pouvons penser qu’il en serait de même en renouvelant l’opération. Reste un troisième moyen : imposer le recul effectif de l’entrée en retraite… toujours sans modifier l’âge légal de 62 ans.