Entre les lignes entre les mots Notes de lecture,

Politique sanitaire, vaccins, pass sanitaire… (quelques textes)

Pourquoi je me suis fait vacciner contre la Covid-19
par Marc Zaffran/Martin Winckler

En des temps où les inquiétudes vis-à-vis des vaccins (et pas seulement) vont bon train, et où les gouvernements ont parfois (suivez mon regard) des discours au moins incohérents, au pire totalitaires, je me permets de dire ici pourquoi, en tant que citoyen, je me fais vacciner – et en particulier, tout récemment, contre la Covid-19.

Important (1) : si vous faites partie des personnes qui contestent la réalité de la pandémie de Covid-19, je ne discuterai pas votre opinion et cet article n’est pas fait pour vous.

Important (2) : Je vis à Montréal (Québec) et j’ai bénéficié de l’organisation communautaire de santé. Je suis allé me faire vacciner dans un centre municipal près de chez moi, à la date indiquée par le site ClicSanté quand je me suis inscrit.

Ensuite, une précision : je suis médecin de formation et, même si je n’exerce plus depuis fin 2008, je continue à baigner dans les informations médicales et sanitaires. Mes choix sont issus à la fois de ma formation, de mes lectures et de mon expérience, qui est celle d’un citoyen, d’un soignant, mais aussi d’un parent.

Ensuite, une déclaration de conflits d’intérêts : je n’en ai aucun dans le domaine considéré. (J’en ai sûrement dans d’autres domaines…)

Je ne suis pas rémunéré/financé/sponsorisé par un fabriquant de vaccins et j’ai la réputation (depuis mon passage sur France Inter, en 2002-2003) d’être critique avec les industriels du médicament. Cette attitude critique remontait à ma collaboration à la Revue Prescrire, entre 1983 et 1989, elle ne date donc pas d’hier. On pourra d’ailleurs lire sur cette page ce que cette revue, très pointilleuse, pense de différents vaccins.

Se faire vacciner ou non

Se faire vacciner ou faire vacciner ses enfants quand on est parents est une décision importante, qui soulève toutes les questions de l’autonomie en santé. Il s’agit d’une part d’opter ou non pour une méthode à visée préventive (on peut rejeter la méthode dans son ensemble) et, d’autre part, d’opter pour un ou plusieurs vaccins.

Cette décision devrait presque toujours faire l’objet d’une information, d’un échange de point de vue, de la prise en compte des craintes des personnes concernées par les professionnelles, et (à mon avis) ne jamais se solder par une décision autoritaire desdits professionnelles, ni être commentée par des jugements de valeur. Le soin est incompatible avec les rapports de force et avec le mépris.

Je suis une personne comme les autres, avant d’être médecin je n’étais pas médecin, et mes décisions personnelles sont fondées sur ce que j’ai observé ou vécu au cours de ces différentes périodes : mon enfance/adolescence, mes études, mon exercice médical (1983-2008), et les quinze années écoulées.

Ce que j’ai vécu dans mon enfance n’est pas neutre : mon père était médecin. Il avait grandi à une époque où les vaccins n’existaient pas, et il nous a vaccinés, mes frère et soeur et moi-même, mais aussi ma mère et tous les membres de la famille qui le demandaient, sans aucune hésitation. Je ne l’ai jamais entendu contraindre personne à se faire vacciner. Dans son esprit, la vaccination était un bienfait pour l’humanité et quand on s’intéresse à l’histoire des maladies (en commençant par la variolisation, pratiquée depuis le 18e siècle, bien avant qu’on sache ce qu’était un virus) il est difficile de prétendre le contraire. (Encore une fois, je parle ici de la méthode, ce qui ne veut pas dire que je mets tous les vaccins dans le même panier, j’y reviens plus loin).

Avant qu’un vaccin existe, j’ai souffert de la rougeole et de la coqueluche. Grâce à la vaccination, j’ai échappé à la polio, à la diphtérie et au tétanos. (Enfin, jusqu’ici. Je pense qu’il faudrait que j’aille me faire faire un rappel…)

Quelques souvenirs :

Je me souviens d’un de mes camarades de classe qui avait avait contracté la poliomyélite à une époque où tout le monde n’avait pas été encore vacciné en France (probablement entre 1955 et 1965). L’un de ses bras était paralysé, et sa main toujours bloquée dans la poche de sa blouse ou de sa veste, pour que son bras ne ballotte pas.

Je me souviens aussi d’avoir reçu, quand j’étais étudiant hospitalier/externe en pédiatrie au centre hospitalier du Mans, un garçon de huit ans qui faisait une encéphalite rougeoleuse, c’est à dire une infection grave du système nerveux provoquée par le virus de la rougeole. Il a gardé des séquelles graves : paralysies, épilepsie, handicap psychomoteur profond. Sa famille ne l’avait jamais vacciné.

Je me souviens d’avoir vu plusieurs personnes mourir de tétanos en réanimation, après un avortement clandestin ou après s’être écorchées à une épine de rose dans leur jardin.

Je me souviens avoir soigné une fratrie de trois enfants de moins de dix ans d’une coqueluche carabinée (les parents étaient opposés au fait de les faire vacciner). Les trois enfants ont beaucoup dérouillé (c’est une saloperie, la coqueluche) mais les parents aussi. Je n’ai pas porté de jugement de valeur, j’ai soigné les enfants, un point c’est tout. Quelques semaines après, la mère est revenue me voir pour discuter des vaccins à leur faire, l’un après l’autre. Et on en a parlé posément. Et elle a pris sa décision posément.

D’un autre côté, en tant que médecin qui vaccinait couramment adultes et enfants, j’ai pu observer des effets indésirables de la vaccination : douleur et rougeur au point d’injection (très fréquent), fièvre et courbatures (également) et parfois fièvre très élevée (en particulier chez deux de mes propres enfants).

Je n’ai pas, au cours de ma carrière, eu à constater d’effets secondaires graves d’un vaccin. Ca ne veut pas dire qu’ils n’existent pas, mais qu’ils sont suffisamment rares pour que je n’en ai pas vus (alors que, je le répète, des effets bénins, j’en ai vu souvent).

Chaque vaccin mérite réflexion

En tant que médecin, j’ai été interrogé par de nombreuses personnes sur la sécurité, l’efficacité et la légitimité des vaccins. Et je leur ai toujours répondu ceci : chaque vaccin concerne une maladie particulière. En principe, vous êtes en droit de peser le pour et le contre de l’intérêt de chaque vaccin face à la probabilité de contracter la maladie concernée.

C’est assez simple à concevoir : quand on ne vit ou ne voyage pas dans un pays où la fièvre jaune est endémique, il n’est pas légitime de se faire vacciner contre elle.

Quand, à l’opposé, une maladie existe partout, et si cette maladie n’a pas de traitement curatif il est légitime de s’en protéger (diphtérie, tétanos, polio).

A noter que lorsqu’une maladie a été éradiquée du globe (c’est le cas de la variole au milieu des années soixante-dix, ce sera bientôt nous l’espérons tous le cas de la polio), il devient moins bénéfique de vacciner que de ne pas le faire : les effets indésirables deviennent inévitablement plus nombreux que les cas de maladie et, bien entendu, les effets graves du vaccin sont alors plus nombreux que ceux de l’infection. Et, de fait, la vaccination contre la variole a été supprimée sur toute la planète. Celle contre la polio pourrait bien l’être d’ici quelques années.

Est-il, pour autant, obligatoire de se faire administrer (ou de faire administrer à ses enfants) tous les vaccins qui existent ?

https://entreleslignesentrelesmots.blog/2021/07/19/politique-sanitaire-vaccins-pass-sanitaire-quelques-textes/