Lettre envoyée aux organisations politiques de Rennes

mardi 19 mars 2002, par Webmestre

Lettre envoyée aux organisations politiques de Rennes

RENNES, le 19 MARS 2002

ATTAC RENNES

Maison du Champ de Mars

7, Cours des Alliés

35000 RENNES

Tel : 06 30 44 55 35

Monsieur, (madame),

Depuis maintenant 3 ans ATTAC et tout spécialement le groupe ATTAC Rennes a porté devant l’opinion des questions essentielles qui pour certaines touchent ni plus ni moins à la question suivante : sommes-nous encore en démocratie ? Cette question est elle-même née d’un constat : les différentes politiques qu’elles soient de droite ou de « gauche » s’alignent désormais dans leurs fondamentaux sur les dogmes de la mondialisation néolibérale. Ce modèle présenté comme inéluctable et comme la forme la plus achevée du progrès génère en fait partout des atteintes à l’environnement et des inégalités sociales croissantes - inégalités entre les peuples spécialement entre le Nord et le Sud, inégalités à l’intérieur même des nations entre riches et pauvres.

Avec d’autres organisations citoyennes, ATTAC pense qu’il est grand temps de mettre un terme à cette dérive et que l’une des voies pour y arriver et de redonner tout son sens au Politique c’est à dire aux élus et dans cette optique le groupe ATTAC Rennes souhaite connaître la position de votre parti sur les points suivants :

1) Des décisions importantes qui engagent l’avenir de la planète se prennent au sein d’organisations multilatérales tels le F.M.I (fond monétaire international), la banque mondiale, l’O.M.C. (organisation mondiale du commerce), l’O.C.D.E (organisation de coopération et de développement économique), etc... Ces décisions sont ensuite présentées à l’opinion comme le produit d’organisations extérieures auxquelles il n’y aurait qu’à se soumettre. Rien n’est plus faux car la France dispose de représentants dans ces diverses organisations et qu’il est urgent de placer ces institutions sous les projecteurs de l’opinion, en particulier de veiller à ce que nos représentants ne s’écartent pas du mandat qu’ils ont reçu. Votre parti à travers l’éventuelle élection de ses candidats s’engage t’il à agir dans le sens des propositions ci-dessus afin de faire la lumière sur les agissements de ces institutions ?

2) Plus proches de nous mais pouvant se rattacher au point précédent sont les mécanismes de fonctionnement de l’Union européenne - parlement, banque centrale, commission, cour de justice, conseil des ministres. Le parlement représentation populaire n’a que peu de pouvoir. Il n’en est pas de même de la commission, véritable machine à privatiser et à déréglementer, sur laquelle les firmes transnationales exercent une pression sans relâche. La commission a de considérables pouvoirs : c’est sur ses textes et uniquement sur eux que les ministres délibèrent. C’est ainsi que les services publics auxquels les Européens sont très attachés - pas seulement en France - sont déréglementés et privatisés l’un après l’autre. En ce moment se sont les chemins de fer et la production d’électricité qui sont dans le collimateur. Les institutions européennes demandent à être démocratisées. Là également vous engagez-vous à faire en sorte par des propositions concrètes que le fonctionnement de ces institutions repasse sous le contrôle de la représentation populaire ?

3) Les flux financiers internationaux représentent des sommes considérables et ne recherchent que le profit immédiat au bénéfice des seuls actionnaires. Ces mouvements de capitaux spéculatifs s’effectuent hors de tout contrôle n’hésitant pas à détruire l’économie de pays ou de régions entières. Ils doivent être taxés, c’est le principe de la taxe TOBIN pour la spéculation monétaire. Outre les fonds qu’elle rapporterait, c’est la valeur symbolique du geste qui importe. Cela montrerait que le pouvoir politique reprend enfin le dessus sur l’hégémonie financière. Vous engagez-vous à agir pour qu’une zone TOBIN se constitue en France et plus généralement en Europe ?

4) Indissociable du point précédent se situe le problème des paradis fiscaux. Ces véritables usines sont destinées à recycler l’argent sale provenant de la drogue, du crime, de la délinquance financière, du terrorisme (les grandes déclarations après le 11 septembre se sont arrêtées aux portes de ces zones de non-droit, on bombarde des innocents mais on ne touche pas à l’essentiel !). Il est urgent d’éradiquer ces paradis fiscaux (ainsi que leurs pendants maritimes que sont les pavillons de complaisance). Un seul exemple : la société ENRON longtemps présentée comme la vitrine du système néolibéral en s’effondrant a révélé la face cachée de l’iceberg : collusion avec les partis dominants (tout spécialement avec l’actuel président des E.U.), ruine de nombreux petits actionnaires et licenciement cumulé à la disparition de sa retraite. Bien entendu les grands dirigeants sentant le vent venir avaient pris soin de retirer leurs « billes » à temps. ENRON possédait près de 900 filiales dans les paradis fiscaux spécialement dans les îles Caïmans. Quelle est votre position sur ce sujet ?

5) Par l’intermédiaire de la dette des pays sont saignés à blanc à travers les plans d’ajustement structurels du F.M.I. et de la banque mondiale (on les retrouve). Ces plans exigent des pays qui en sont la cible toujours plus d’austérité. Pour payer leur dette déjà x fois remboursée les pays concernés sont obligés de rogner sur leurs dépenses publiques, d’éducation, de santé, de transports etc... Le cas de l’Argentine longtemps considéré comme le meilleur élève du F.M.I. est le meilleur exemple de la nocivité de ces organismes. Les agissements des représentants de la France dans ces deux institutions relèvent carrément du secret (en fait alignement systématique sur les positions de Washington). On est en droit de savoir quel est le comportement de nos représentants. Vous engagez-vous à vous intéresser et à faire connaître les positions prises en notre nom par les représentants français dans ces institutions ?

6) Depuis quelques années nous nous inquiétons à juste titre de la qualité de l’alimentation. De douloureux précédents nous ont rendus méfiants : bœuf aux hormones, vache folle. Une nouvelle menace d’envergure se met en place avec la culture des O.G.M.. Des expérimentations sont menées en plein champ sans étude préalable sur la dissémination, leur impact sur l’environnement et la santé. Le plus grave est que ces « recherches » sont menées par des firmes transnationales (parfois avec l’aide des pouvoirs publics) avec pour but le profit immédiat et la mise en dépendance de paysans et d’agriculteurs qui ne peuvent que s’approvisionner auprès d’elles. Vos candidats s’engagent-ils pour interdire toute production d’OGM menée dans ces conditions et à agir pour faire cesser toute poursuite judiciaire contre les maires ayant interdit la culture d’O.G.M. sur leur commune ?

7) Des biens doivent être classés patrimoine de l’humanité, l’eau est de ceux-ci. De véritables mammouths financiers se sont constitués autour de ce bien après que la puissance publique leur en eut confié la gestion. Ces firmes se sont appuyées sur les bénéfices générés par la distribution d’eau (toujours plus chère que lorsque cette gestion est restée entre les mains des pouvoirs publics) pour bâtir de véritables empires dans les domaines des média, des nouvelles technologies, de l’audiovisuel. Vivendi en est un des exemples les plus accomplis et les récentes déclarations de son PDG font froid dans le dos. Il est urgent que la gestion de l’eau revienne dans le giron public. Nous attendons un engagement clair de votre part sur ce point.

8) Il serait gravissime de croire que les différents sujets abordés ci-dessus apparaissent comme trop loin de nous, à une échelle beaucoup trop grande, loin de nos préoccupations quotidiennes. Bien au contraire les échelles sont étroitement imbriquées (locale, régionale et globale) et des décisions prises par des organismes multilatéraux ou par des firmes transnationales ont tôt fait d’avoir des conséquences jusque dans nos régions et nos villes (voir le cas de MITSUBISHI). Le crédo ultralibéral étant de « rentabiliser » au maximum on en arrive à des délocalisations d’entreprises, des fermetures d’usines, parfois rentables mais pas assez...

Les points précédents ne doivent pas rester dans l’ombre. Il est du travail et du devoir des représentants du peuple de s’en préoccuper, de rendre public les agissements et le fonctionnement des organismes transnationaux. Il faut aussi agir pour que ces organismes soient réformés en profondeur afin de leur donner un fonctionnement démocratique respectueux du désir des peuples. Il est aussi grand temps que ces organismes ne soient plus gangrenés par l’idéologie néolibérale, que toutes les tendances puissent s’y exprimer. En tant que parti politique susceptible de présenter des candidats aux prochaines élections, les citoyens sont en droit de savoir quelles sont les réponses que vous apportez aux questions ci-dessus. Vos propositions et vos réponses à ce questionnaire doivent être connues et leur suivi assuré tout au long du mandat de vos candidats s’ils sont élus. C’est la tâche à laquelle s’attelle le groupe ATTAC Rennes.

Je vous prie d’agréer monsieur (madame) l’expression de mes salutations distinguées.

Pour le groupe ATTAC RENNES

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