Après la mobilisation du mardi 7 février, quelles perspectives pour le mouvement anti-CPE ?

vendredi 10 février 2006, par Webmestre

Une interview de Maxime Combes, militant d’ATTAC Campus
mercredi 8 février 2006

Question : Les avis sont nuancés sur l’importance de la mobilisation anti-CPE de ce mardi 7.02. Quel est ton sentiment ?

Maxime Combes : Ne nous racontons pas d’histoire, la mobilisation de ce mardi est, bien-entendu, insuffisante pour faire plier un gouvernement arrogant et déterminé à faire passer en force ses mesures de régression sociale. D’un autre côté, personne n’imaginait obtenir dès mardi soir le rapport de force suffisant pour imposer le retrait du CPE. C’est pourquoi le collectif unitaire des organisations de jeunesse avait déjà "convenu de poursuivre la mobilisation unitaire jusqu’au retrait du CPE" lors de sa réunion du mercredi 1er février. Et compte-tenu :
- du passage en force du gouvernement (procédure d’urgence et calendrier précipité),
- du peu de temps qui nous a donc été laissé pour mener un véritable travail d’explicitation et de sensibilisation
- du mattraquage gouvernemental dans les médias (télés, radios, quotidiens, web, ...) sur l’idée que "faute de mieux, le CPE serait une bonne solution", les 400 000 personnes dans la rue ce mardi (sans qu’il n’y ait d’appels à la grève largement repris) et le retournement de l’opinion publique qui aujourd’hui est majoritairement hostile au CPE sont des éléments très significatifs qu’une véritable prise de conscience s’est opérée sur la nocivité du CPE. Bref, des signes encourageants et loin d’être aussi négatifs que certains l’affirment, sans que cela ne soit suffisant pour faire plier un gouvernement méprisant.

Q. Comment, à ton avis, poursuivre et relancer la mobilisation dans la jeunesse ? Quelles initiatives pourrait prendre, dans les prochains jours, le front unitaire des organisations de jeunesse, des syndicats et des formations politiques afin d’obtenir le retrait du CPE ?

M. C. La totalité des organisations de jeunesse ont pris l’engagement public de poursuivre la mobilisation jusqu’au retrait du CPE, ce qui est bien différent d’une mobilisation témoignage ayant d’autres objectifs que le retrait du texte (ce que laissent pourtant penser certaines déclarations politiques). D’autre part, il faut bien prendre conscience que la mobilisation de ce mardi n’était pas simplement une mobilisation de "jeunes" concernant une mesure touchant "les jeunes". Salariés, chômeurs et précaires de tous âges étaient aussi présents. Ce qui est à la fois un atout et une difficulté. Un atout car il est bien évident que le CPE entre dans un cadre général d’attaques régulières (indemnisations chômages, CNE, ...) contre le code du travail et l’existence même du CDI, afin de déréguler et flexibiliser le marché du travail sans tenir compte des intérêts des salariés/chômeurs. Logique de libéralisation du marché du travail qui sera menée à terme par ce gouvernement lors de la réécriture du code du travail prévue pour mai ou juin et qui concerne donc l’intégralité des citoyens de ce pays ! C’est également unedifficulté parce que le processus de concertation entre tous les acteurs de cette mobilisation est plus longue et parfois moins sereine, notamment en raison de l’absence d’un cadre unitaire regroupant toutes les forces syndicales, politiques et associatives. Le CPE est la face immergée d’un véritable projet de société où la précarité et l’insécurité sociale sont généralisées et institutionnalisées. Il est donc important que la totalité des acteurs se retrouvent pour envisager des réactions communes.

Q. Certes, mais comment faire ?

M. C. En s’appuyant sur l’opinion publique et sa franche hostilité au CPE, et également sur les retours très positifs de mobilisation locale (Toulouse, Rennes, des petites villes, ...), il me semble nécessaire de :
- poursuivre le travail d’information et de sensibilisation, c’est-à-dire un véritable travail d’éducation populaire sur la remise en cause profonde de la relation employeur-employé qu’illlustrent les attaques répétées contre le code du travail, à l’image de ce que nous avons fait lors de la campagne référendaire de 2005 ;
- donner des perspectives de mobilisation : pourquoi ne pas imaginer des journées de mobilisation locales avec une date (semaine prochaine ?) de mobilisation nationale avec des appels clairs à la grève de la part des syndicats ?
- s’inscrire dans une mobilisation de long terme, car si le CPE n’est qu’une étape supplémentaire de la remise en cause beaucoup plus vaste du code du travail, ce que je crois profondément, on ne peut pas se limiter à une mobilisation anti-CPE sur une ou plusieurs journées d’action : il faut à la fois prendre en compte la logique générale dans laquelle s’inscrit le CPE et construire les conditions de la mobilisation la plus large et unitaire possible pour que le rapport de force soit à notre avantage.

Et enfin, s’appuyer sur les propositions qui sont faites, ici et là, par des collectifs locaux ou des Assemblées Générales de lycéens, étudiants, précaires et salariés.

Par exemple, l’Assemblée Générale qui s’est tenue à Paris mardi soir a décidé d’appeler à une manifestation à 15 heures à République mardi 14 février. La proposition sera présentée lors de la réunion des organisations présentes dans la jeunesse qui doit ce tenir ce mercredi soir, 8 février, à Montreuil. Nous verrons bien ...

source

Répondre à cet article