Atelier Démocratie

Introduction : aller vers une autre démocratie, citoyenne et populaire

samedi 20 janvier 2007, par Webmestre

Il n’est pas possible d’expliciter l’intégralité du volet "démocratie"
du Manifeste d’ATTAC dans le temps imparti . Même en supprimant le temps
de débat, ce que je ne souhaite certainement pas faire , ce ne serait
pas possible tant la question démocratique est vaste. La commission "
démocratie " d’ATTAC a fournie un immense travail et certain nombre
d’analyses sur la démocratie réellement existante, ses méfaits et ses
limites. Certains membres ont de plus dégagé des éléments de rupture en
vue d’une "autre démocratie". Je vais inscrire mon propos dans cette
vision. Le corpus initial a été présenté à l’Université d’ ATTAC à
Poitiers l’été dernier. La plupart des textes sont sur le site d’ATTAC
France ou sur d’autres sites. Ma tâche introductive lors de cette séance
sur ce thème va alors consister à introduire la problématique générale à
l’aide d’un diaporama qui se veut plus pédagogique, plus "collé" aux
terminologies. Je laisserai le soin à Jean TEZENAS de présenter ensuite
le thème de la démocratie dans l’entreprise. Le thème de la démocratie
en Europe - ce que je nomme "gouvernance européenne" - est abordé dans
un autre atelier.

1 - Préliminaire spécifique : Altermondialisme et altermondialisation.

Tout d’abord il convient d’avoir à l’esprit que l’altermondialisme
signifie deux choses qui vont ensemble mais qu’il faut distinguer : le
but qui est un autre monde, une autre Europe, une autre France et les
processus sociaux concrets convergents vers cette perspective.
L’ensemble ne forme pas un programme élaboré " par en haut " et mis en
application par un parti discipliné à cette fin mais un projet non
exhaustif, " non bouclé ", construit collectivement " en avançant " par
l’action et le débat.

S’agissant de notre thème, j’ai appelé alterdémocratie constitue le but
recherché et démocratisation le processus qui conduit à cette autre
démocratie citoyenne et populaire. Dés lors, la " généralisation de
l’intervention citoyenne " évoquée par le Manifeste relève alors plus du
moyen à proposer que du but. Cette généralisation mérite d’être précisée
en notant qu’elle implique des changements structurels profonds, une
révolution multiforme.

Sur ce point, pour construire un autre monde, le Manifeste d’ATTAC
propose de " scier les principaux piliers du néolibéralisme " ; ce qui
signifie d’abord rompre avec trois logiques profondes du capitalisme que
sont la financiarisation du monde, l’appropriation privée des moyens de
production (sans la supprimer partout), la distribution des biens et
services par le marché nécessairement sélective et inégalitaire car
fonction de la demande solvable. Il ne s’agit pas de supprimer
totalement le marché mais de réduire sa place et son influence qui
place, via la concurrence généralisée et la " main invisible " du
marché, les forces du profit avant tout et notamment des firmes
multinationales au lieu et place d’un espace de décision démocratique
pour le peuple et les citoyens ordinaires. L’alterdémocratie suppose
aussi cette appropriation sociale.

Mais cela signifie aussi rupture avec les institutions politiques et
administratives qui reproduisent le mode dominant de
gestion-distribution du pouvoir et des pouvoirs. De nombreux changements
à engager concernent les institutions du pouvoir d’Etat, du pouvoir
décentralisé, du pouvoir répressif pénal et policier, du pouvoir
d’influence idéologique médiatique.

2 - La démocratie, c’est le pouvoir populaire !

Le terme de démocratie a connu plusieurs définitions et s’est vu
accompagné d’adjectifs divers venant préciser le type de démocratie
évoqué. A s’en tenir à la racine, démocratie signifie pouvoir du peuple.
Une définition forte qui oblige à engager une réflexion à la fois sur le
pouvoir et sur le peuple. Le pouvoir dans les sociétés modernes se
décline en deux sphères problématiques : le pouvoir d’Etat et les
pouvoirs dans la société civile. A ce stade je dirais qu’on ne saurait
l’envisager que d’un bout, soit du seul côté de la société civile, soit
du côté de l’Etat. Par ailleurs on se trouve devant deux gros monstres
problématiques - la nature de l’Etat et la division Etat/société civile
- qui ne vont pas être abordé ce jour et qui pourrait donner lieu à une
formation plus pointue. Quant au peuple, il est le sujet collectif de la
démocratie comme le sujet de l’émancipation altermondialiste. Il est
possible ici de déblayer le terrain . D’autant que le terme ne figure
pas dans le dictionnaire Alter. Patrick TORT inscrivait le peuple dans
un rapport social dirigeant/dirigé, qui est plus large (car non réduit à
la sphère étatique) que le rapport plus classique entre l’élite
gouvernants et la masse populaire gouvernée. Pour les altermondialistes,
le peuple est sur un territoire donné l’ensemble de la population
résidente y compris celle d’origine étrangère. Un premier niveau de
complexité est à souligner si l’on introduit la notion de citoyenneté
puisque l’oligarchie peut être citoyenne tout en n’étant pas ou plus
"du" peuple selon l’acception sociologique. Un deuxième niveau de
complexité survient par compaison avec des notions proches : multitudes,
masses, société civile, mais aussi "couches populaires" (qui ne comprend
dans une société de classes que les catégories sociales les plus basses
 : ouvriers et employés par exemple). Le diaporama ne contient pas ces
dernières précisions comparatives.

3 - La démocratie libérale

Si l’idéal démocratique recoupe la formule de A Lincoln du "
gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple "alors il est aisé
de remarquer que notre démocratie actuelle en est loin, très loin. Le
peuple n’y est "souverain’ qu’en dernier ressort . Nous vivons dans une
démocratie " peau de chagrin ", très restreinte voire rabougrie tant
dans le temps que dans son domaine d’exercice et ses modalités. Le
domaine d’exercice de la démocratie représentative consiste seulement à
élire des représentants dans le champ politique. Les modalités de ce
choix sont très encadrées par les grands appareils d’influence
idéologiques qui réduisent de milles façons la portée du geste
démocratique. Quant au temps démocratique, il est ridicule au regard du
temps travaillé et du temps de récupération de la force de travail comme
du temps consacré à la consommation marchande. Le temps aliéné et
exploité est largement supérieur au temps ou l’on peut entrevoir en
filigrane de l’acte démocratique " la maîtrise de son destin ". La
démocratie est de fait confisquée par une minorité qui gère le processus
démocratique en le mettant sous tutelle ainsi que le dit le Manifeste.
On pourrait alors dire qu’il s’agit d’une démocratie bourgeoise, c’est à
dire bénéficiant à une classe, à une oligarchie à condition de dire
aussi qu’elle est une longue conquête ouvrière (du mouvement ouvrier
français en tout cas) . Une contradiction qui pèse plus dans un sens que
dans un autre mais qui permet aussi d’affirmer que la démocratie est à
la fois manipulation et point d’appui . Elle est donc par nature
conflictuelle (cf contribution "Démocratie et pouvoir"). Il ne s’agit
donc pas seulement de critiquer une " démocratie formelle " pour la
faiblesse de ce qu’elle affiche dans ses textes fondamentaux, bien que
ce soit nécessaire. Il s’agit aussi de critiquer les processus
d’appropriation du fait démocratique par des couches sociales précises,
élites politiques, élites médiatiques, dirigeants économiques le tout
sur fond de crise sociale qui accentue la dépossession populaire.

Pour sortir de ce type de démocratie confisquée par une minorité - qui
est plus une classe possédante qu’une aristocratie (des meilleurs) - il
nous faut maintenant dessiner à grand traits cette autre démocratie et
faire des propositions qui organisent une transition vers elle.

Auparavant un détour critique s’impose par l’explicitation 1 de la
démocratie représentative et 2 de la démocratie participative.

La démocratie représentative : conceptions et critiques

La démocratie représentative se conçoit sous deux formes (cf diaporama)
dont l’une et meilleure que l’autre mais même dans ce cas nous sommes
encore dans un cadre restreint .

Les avatars modernes de la démocratie représentative : Face aux
critiques scientifiques de la représentation et au discours sur la
"crise de la représentation" deux axes de réforme sont apparus : l’un
par le bas plaide pour la gouvernance, l’autre par le haut fait oeuvre
d’inventivité via la démocratie participative.

La gouvernance néolibérale tend à substituer la
démocratie représentative par l’institutionnalisation de lieux de
décisions ou interviennent des experts, des élus (qui ne sont pas
le cadre de leur mandat direct), des réprésentants de la société
civile qui sont des patrons, des syndicalistes, des représentants
religieux, des associatifs. L’intégration des délégués syndicaux
dans ces instances notamment au niveau européen est un danger pour
les syndicats, d’autant que sévit parallèlement partout dans le
monde une forte répression contre les syndicalistes de terrain.

La démocratie participative se conçoit à côté de la
démocratie représentative pour l’améliorer . Elle vise à soumettre
aux débats des citoyens des dossiers qui ne le sont guère.

Béquille ou point d’appui pour une transition ? La démocratie
participative est l’objet d’un enjeux : soit elle ne reste qu’un
complément - de surcroît aisément manipulé par les élus - de la
démocratie représentative, soit elle subvertie son cadre et permet un
dépassement vers autre chose. La démocratie participative s’inscrit
alors dans un cadre global plus vaste de démocratisation générale de la
société. J’ai tendance à penser ce processus comme l’aboutissement d’un
mouvement de contestation sociale qui débute " en contre " d’abord puis
peu à peu s’émancipe et tend à vouloir prendre en main son destin dans
tous les champs sociaux.

4 - Nous voulons une "autre démocratie" !

Les choix démocratiques peuvent porter non seulement sur des individus
titulaires de mandats mais sur des stratégies d’investissement productif
au niveau national ou régional. Modifier la nature des mandats et
élargir le champ de l’intervention aux procédés de planification d’un
/alerdéveloppement /(principalement producteur de valeur d’usage et
moins de valeur d’échange) constitue deux ruptures franches avec la
démocratie bourgeoise. On remarquera par rapport aux passages du
Manifeste qu’il ne s’agit pas simplement de reconquérir les pouvoirs
conquis jadis puis perdu avec la gouvernance néolibérale, un peu comme
si un âge d’or démocratique avait précédemment existé. Il ne s’agit pas
plus de se réapproprier un passé que le peuple n’a jamais conservé hors
des rares périodes révolutionnaires.

5 - Les différents thèmes sur la démocratie .

Ils figurent sur le 4 pages avec plusieurs "mesures" qui sont autant de
points à approfondir . Jean TEZENAS va introduire le thème de la
démocratie en entreprise.

Christian DELARUE Membre de la commission nationale " Démocratie "

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