Attac Rennes : conférence sur la crise financière avec Dominique Plihon, membre du conseil scientifique d’Attac.

vendredi 28 novembre 2008, par Webmestre

Attac Rennes organise une conférence sur la crise financière le vendredi
28 novembre à 18h30 à la salle de spectacle de la maison du champ de
mars. Cette conférence sera animée par Dominique Plihon, membre du
conseil scientifique d’Attac.

Trois points seront abordés : les mécanismes de la crise, notre analyse
de cette crise du capitalisme, et les propositions d’Attac. L’analyse
portera non seulement sur la crise financière, mais aussi sur la
dimension "globale", systémique", planétaire" et "pluridimensionnelle"
de cette crise.

La présentation sera suivie d’un débat avec la salle ; nous espérons que
vous viendrez nombreux pour cette conférence dont le thème est d’une
actualité brûlante, et qui marque la rentrée d’Attac Rennes !

Pour plus d’information sur Attac et son analyse de la crise financière
 :

À la fondation d’Attac, en 1998, ce slogan se détachait sur fond de
krach financier en Extrême-Orient. Depuis, nous avons vécu d’autres
crises provoquées par les marchés financiers : en Russie, au Brésil, en
Turquie, en Argentine, l’éclatement de la bulle de la « nouvelle
économie » en 2001.
Actuellement, le monde riche est au milieu de la crise la plus grave
depuis la Grande Dépression de 1929. Le krach de Wall Street, en
septembre 2008, marque la fin d’une époque : le système du capitalisme
financier, un système mû par la recherche du profit maximum, s’est
écroulé. Il s’est détruit par ses propres contradictions. Les ondes de
choc viennent d’atteindre l’économie réelle. Les États-Unis sont entrés
en récession, suivis par l’Union européenne. En fin de compte, c’est
l’économie mondiale qui en subira les conséquences.

La contraction de l’activité économique va entraîner davantage de
chômage et d’inégalité. De nouvelles pressions vont être exercées sur
les salariés pour qu’ils acceptent davantage de “flexibilité sur le
marché du travail”, une diminution des salaires et de la protection
sociale. La diminution de la demande globale provenant des pays riches
aura des répercussions sur les économies vulnérables des pays en
développement et augmentera la pauvreté. Les Objectifs du Millénaire,
comme les objectifs d’un développement planétaire qui soit durable et
respectueux de conditions sociales et de protection de l’environnement,
deviennent tout à fait impossibles à atteindre.

Crise financière et récession coïncident avec de brutales variations du
prix du pétrole et de la nourriture, qui ont débouché sur une grave
crise sociale et des émeutes de la faim dans plusieurs pays du Sud. Les
variations des prix des matières premières et de la nourriture ont des
causes multiples. Mais à nouveau, comme pour les différentes crises
financières, la spéculation par des fonds de placement et autres
investisseurs institutionnels a largement contribué à l’instabilité des
prix.
Le déclencheur de la crise fut les prêts hypothécaires excessifs
consentis à des ménages en situation précaire aux États-Unis et la
procédure de titrisation qui a permis de vendre ces créances douteuses à
des institutions financières et à des ménages, tant aux États-Unis
qu’ailleurs dans le monde. La vague de ruptures de paiement a eu des
conséquences dramatiques pour les institutions financières (banques
d’affaires et d’investissement, hedge funds, et maintenant les grandes
banques traditionnelles). Maintenant c’est même le secteur non financier
qui est affecté. La perspective économique, sociale et environnementale
pour 2009 est sombre pour la plus grande partie de la planète.

Nous aurions dû nous y attendre. Le krach confirme malheureusement les
prévisions d’économistes hétérodoxes comme le prix Nobel Joseph
Stiglitz, Attac, les mouvements sociaux et d’autres voix critiques. Même
les superviseurs savaient que le système était au bord du gouffre, mais
il n’y avait pas de volonté d’agir à cause de la croyance dominante dans
les capacités autorégulatrices du marché.

Aujourd’hui, sous la pression de la crise, même la communauté financière
réclame des réformes. Mais les réformes proposées ne vont pas assez
loin, puisqu’elles ne s’en prennent pas aux problèmes systémiques qui
expliquent la crise. Elles concernent surtout le secteur financier et
visent la stabilité. Ce n’est pas suffisant. Le capitalisme financier a
également des conséquences désastreuses sur la distribution de la
richesse et la démocratie. Si les banquiers réclament une intervention
de l’État, ce qu’ils veulent c’est socialiser les pertes et garder les
bénéfices dans des poches résolument privées. L’opération de sauvetage
menée par le gouvernement des États-Unis pour 700 milliards de dollars
(la plus importante qui ait jamais eu lieu), les interventions au
Royaume-Uni, en Allemagne et dans d’autres pays européens relèvent de
cette logique. Quand la communauté financière parle de réforme, il
s’agit au mieux d’une (re)réglementation ponctuelle et de gestion de
crise à court terme, histoire de sauver le néolibéralisme et de
retrouver les bonnes vieilles habitudes une fois le danger passé.
Ce qu’il nous faut, dans l’intérêt de la grande majorité de la
population, ce sont de véritables changements vers un autre paradigme,
où la finance doit être un instrument au service de la justice sociale,
de la stabilité économique et du développement durable. Nous ne devons
pas accepter un retour au statu quo dans les années qui viennent.

La crise n’est pas le résultat d’un malheureux concours de
circonstances, pas plus qu’elle ne peut se réduire à quelque défaillance
d’un système de contrôle, des agences de notation ou à des erreurs
d’acteurs individuels. Ses racines sont systémiques et c’est donc la
structure et les mécanismes du système lui-même qui sont en cause.

Les marchés financiers représentent le centre et le moteur de la
mondialisation néolibérale. La domination du secteur financier sur
l’économie réelle remonte à l’introduction de taux de change flottants
entre les principales devises en 1973, en même temps qu’était aboli tout
contrôle sur les mouvements de capitaux et qu’étaient libéralisés et
dérégulés les marchés financiers, y compris des firmes d’audit
soi-disant indépendantes mais en fait directement soumises à la pression
du secteur financier. Depuis, les institutions financières et les
mécanismes qu’elles mettent en place ont connu une expansion rapide ; la
masse des actifs financiers, les dettes et la recherche de bénéfices se
développent de concert. Il est important de garder à l’esprit la brutale
accélération de ce processus après 2001, quand l’économie américaine se
remettait de la crise des nouvelles technologies, en particulier
l’augmentation spectaculaire de la dette intérieure des États-Unis
(notamment l’endettement des ménages) et de son déficit extérieur,
financé par le reste du monde.

Ces tendances combinées ont mené au développement d’un nouveau modèle
économique, une nouvelle forme de capitalisme, que certains appellent
"mondialisation", d’autres "capitalisme financier" et d’autres encore
"capitalisme actionnarial". Peu importe le nom, un fait est clair :
alors qu’auparavant les marchés financiers avaient un rôle subordonné à
l’économie réelle, ce rapport a été inversé. La priorité donnée aux « 
intérêts financiers » sur l’économie « réelle » fait que toutes les
activités économiques servent à créer des bénéfices sur les marchés
financiers et que des instruments financiers sont inventés pour faire
des bénéfices uniquement sur les marchés financiers, sans se préoccuper
de préserver une production et une agriculture durables ni d’ailleurs de
l’épargne des clients « normaux ». La logique et la dynamique de
maximisation des profits immédiats pénètrent tous les pores de la vie
économique et sociale. La mobilité parfaite du capital financier,
résultat des politiques néolibérales, joue un rôle crucial dans
l’économie mondiale actuelle. Elle crée une concurrence planétaire non
seulement entre entreprises multinationales, mais entre États, entre
leurs systèmes sociaux et fiscaux, entre les travailleurs de différentes
parties du monde. En créant un rapport de pouvoir favorable au patronat
et défavorable aux travailleurs, cette domination du capital a mené à
des inégalités croissantes, à une diminution des normes sociales et
environnementales ainsi que des conditions de travail, et à la
privatisation des biens fondamentaux et des services publics.

Bref, la « liberté » des acteurs financiers s’est étendue au détriment
de la vaste majorité des gens et a développé des activités économiques
qui détériorent l’environnement ; l’échec de ce modèle n’a jamais été
aussi évident qu’aujourd’hui, comme l’attestent la crise alimentaire, la
crise énergétique et les changements climatiques. Ce modèle, soutenu par
les gouvernements partout dans le monde, est complètement discrédité. Il
faut donc en tirer les conséquences afin que les décideurs politiques et
économiques inversent complètement ce système financier inéquitable et
incompatible avec un développement durable, afin de mettre l’économie au
service de l’équité, du développement durable et des besoins de la
population.

Une occasion historique s’est créée. Il dépendra de la pression de
l’opinion publique de la transformer en une politique radicalement
différente.

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