Anti-altermondialisme : une présentation.

jeudi 1er février 2007, par Webmestre

LE MOUVEMENT ANTI / ALTERMONDIALISTE par Christian Delarue

Introduction : Du local au global ou les multiples dimensions des forums anti/altermondialistes

Les forums sociaux rassemblent des acteurs divers - associations et syndicats - qui respectent la charte des forum sociaux mondiaux. Les partis politiques et les institutions officielles et gouvernementales en sont exclues . Certaines ONG se prévalent de pratiques partiellement alternatives (par exemple relativement dégagées des logiques marchandes) dans leur secteur particulier, d’autres de pratiques de luttes sectorielles, d’autres encore combinent fonctionnement alternatif et pratiques de luttes sociales. Dans l’ensemble ces acteurs sociaux font la promotion d’autres valeurs, d’autres critères . Ce qui leur permet de participer à ces forum afin que le débat débouche sur la convergence des alternatives pour "un autre monde".

Ces forum respectent le besoin de se rassembler au plan local FSL ou continental - FSE - ou mondial (polycentré en 2006) et ce dans le respect des spécificités de chacun : Face aux enjeux, face à la force de la mondialisation néolibérale, beaucoup acteurs sociaux sont conscients de la nécessité de se rassembler, de faire force commune, d’oeuvrer aux convergences . Les Forum ont, de ce point de vue, ce mérite du rassemblement, qui n’est pas que du bavardage sans conséquence. Ils ont l’avantage de mettre en relation ces acteurs trop souvent éloignés et de favoriser des convergences vers "un autre monde possible" . On peut ainsi indiquer que l’altermondialisation concrète dessine en pointillé un altermonde radicalement différent, un "postcapitalisme" profondément démocratique et solidaire. Ce "dessin en pointillé" n’est nullement compensé par une élaboration programmatique toute faite. Ce défaut a été retourné en avantage, celui du respect des spécificités de chacun . Ce sont le débat et les manifestations internationales qui forment perspectives.

I - LES ALTERMONDIALISTES EXISTENT : UN "MOUVEMENT DE MOUVEMENTS"

"La preuve du pudding c’est qu’il se mange !" D’aucuns ont parfois un doute sur l’existence d’un mouvement altermondialiste lui-même . Or les altermondialistes tiennent forum et manifestent contre le G8 ou l’OMC ou d’autres forces du néolibéralisme . Leur existence de fait donc aucun doute. Et, autre certitude, ces anti/altermondialistes ne sont pas tous membres d’ATTAC. Cette sphère est plus large : elle comprends notamment des syndicalistes, les libertaires, des forces politiques anticapitalistes diverses.

La caractérisation fait débat : Les contours de cette nouvelle force internationale ne sont pas bien définis. D’aucuns parle alors de mouvance . Malgré le flou des limites et la pluralité des acteurs, on peut sans doute évoquer un « mouvement des mouvements » avec plusieurs composantes dont ATTAC .

Dans les forums sociaux locaux , continentaux ou mondiaux ATTAC n’est bien qu’une composante des participants.

S’agissant des manifestants contre les institutions internationales FMI , BM, OMC ou contre les groupes dirigeants de la planète les « G » (G8, G 10 etc) on observe plusieurs éléments :

· un nombre croissant de participants depuis 1999 (Seattle) débouchant sur une véritable lame de fond,

· une expansion géographique réelle touchant plusieurs continents,

· une base sociale variée : pas que des étudiants, mais aussi des paysans, des syndicalistes, des femmes, des membres d’ONG... appartenant ou non à une organisation,

· une radicalité croissante qui ne signifie pas emploi de la violence mais plutôt critique du capitalisme et du productivisme . Cette radicalité observée d’abord à Florence est allé de pair avec un élargissement du mouvement. La Charte des Forums sociaux inclut une ferme opposition à la mondialisation capitaliste.

Ajoutons qu’il n’y a pas séparation entre celles et ceux qui causent et celles et ceux qui manifestent. Les forums ne représentent pas seulement un lieu d’échanges collectifs, ils favorisent l’action et les mobilisations. Même les partis politiques , non présents statutairement dans les forums, se rencontrent à ces occasions.

Quid du mouvement ouvrier ? Tout cela constitue-t-il un « mouvement constituant » ? Il semble que oui . Mais est-ce à dire que ce « neuf » remplace le « vieux », le mouvement ouvrier traditionnel ? La réponse est négative car ce « mouvement des mouvements » n’a pas de par sa diversité de programme propre. De plus son fonctionnement en diffère profondément . Il ne procède pas de décisions d’une instance quelconque mais de la coopération de ses composantes oeuvrant aux convergences diverses et aux mobilisations. Les « Appels » traduisent ces efforts de coopération.

II - NAISSANCE ET MONTEE EN PUISSANCE DU MOUVEMENT : REVENDICATIONS ET PRATIQUES

Les racines : La chute du mur a laissé un temps un essoufflement des luttes internationales issues des mouvements ouvriers classiques mais la contestation a repris avec l’évolution du capitalisme, ce que l’on pourrait rapidement traduire par le passage de l’internationalisation marchande entre Etats à la mondialisation du capital sous ses trois formes marchande, productive et surtout financière.

A) Les annèes charnières

Le reflux des luttes internationales s’observe à partir de la "chute du mur" . Au niveau mondial au moment de la fin des régimes dits communistes l’idéologie de "la fin de l’histoire" promue par Françis FUKUYAMA connait un vif succès qui confirme peu ou prou la réalité de l’essoufflement des luttes internationales dans de nombreux pays. En France on assiste à l’élaboration progressive du social-libéralisme notamment avec la Fondation St Simon . Dans la même veine, JP HUCHON justifiera ( ) la simple alternance au sommet de l’Etat contre l’alternative en politique.

Le renouveau théorique et la transcroissance des luttes de 1993 à 1997 : 1994 marque l’émergence de la lutte des zappatistes et en France l’apparition du mouvement des chômeurs et précaires avec AC ! Chesnais écrit "La mondialisation du capital" et on remarque ensuite une renaissance d’un marxisme critique (nombreuses revues, collaborations plurielles) . En novembre 1995 le débat Notat / Bourdieu clive les élites et la société en plein mouvement de lutte pour la défense des services publics . En décembre 1997 Ignaco RAMONET écrit un article du Monde Diplomatique ( ) contre la dictature des marchés .

B) Les premiers pas et la nouvelle dynamique

a ) Les premiers temps de l’antimondialisation :

La résistance au néolibéralisme est nécessaire mais un voisinage douteux celui de l’extrême-droite antimondialiste a contraint le mouvement à se démarquer de l’antimondialisation "brune", nationaliste et xénophobe ; d’ou le changement de nom en altermondialisation (accent sur les pratiques sociales de construction) ou en mouvement altermondialiste (accent sur les revendications et perspectives).

b ) Anti-alter car nous voulons un "autre monde possible"

- Il s’agit de "tenir les deux bouts" des revendications - "contre" et "pour" - et d’agir sur tous fronts : Les altermondialistes veulent partir des résistances "contre" mais aussi à partir de là tracer des perpectives alternatives pour un autre monde . L’altermondialisme combine donc antimondialisme antiibéral et nouvelle stratégie d’une émancipation vers un postcapitalisme démocratique et solidaire ; un monde vivable pour tous, fraternel, laïc et pacifique. Parmi les 12 propositions du FSM de Porto Alégre 2005 comme "socle minimal" pour un "autre monde possible", on trouve l’annulation de la dette, la mise en place de taxes, le démantèlement des paradis fiscaux, l’élaboration de nouvelles règles économiques, notamment pour favoriser la production de valeurs d’usage via de véritables services publics...

Il s’agit aussi de mettre en place des processus concrets : on évoquera alors plus l’altermondialisation que l’altermondialisme qui lui apparait plus dans les luttes, les revendications, les manifestations. Mais les champs ne sont pas séparés.

Deux dialectiques se combinent et s’entrecroisent :
les pratiques et les théories : altermondialisation (forum et convergence : les rassemblements pour échanger) et anti-altermondialisme (ATTAC, Via Campesina, Fondation Copernic... : les forces de propositions de résistances et d’alternatives)
Du global au local et retour : des FSM aux FSL et retour.

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