Ces douze projets très polluants financés par l’État grâce à nos cotisations retraites et notre épargne

PAR BARNABÉ BINCTIN, OLIVIER PETITJEAN 11 DÉCEMBRE 2017

Quand une mine de charbon géante engloutit un village en Allemagne, quand des Amérindiens sont chassés de leurs terres par un oléoduc, quand les compagnies pétrolières s’attaquent à l’Arctique, quand des millions de tonnes de CO2 supplémentaires s’apprêtent à être répandues dans l’atmosphère, c’est un peu, et bien malgré nous, grâce à notre argent. Voici douze projets méga-polluants dans lesquels l’Etat investit une partie de notre épargne et de nos cotisations retraites. Pour que la finance soit au service de « l’action climat », comme le souhaite Emmanuel Macron, il y a encore du travail !

Deux ans après la COP21 et l’Accord de Paris, Emmanuel Macron convoque un nouveau sommet international sur le climat le 12 décembre à Paris, le « One Planet Summit ». Une cinquantaine de personnalités et de chefs d’État y assisteront. L’objectif est double : réaffirmer d’abord, malgré le retrait des États-Unis, les objectifs internationaux en matière de protection du climat, en particulier celui de maintenir le réchauffement global des températures en deçà de 2ºC ; Ensuite, s’appuyer sur la finance pour atteindre ces objectifs, à grands coups d’« obligations vertes », de portefeuilles « décarbonés », de marchés de quotas d’émission de gaz à effet de serre, et autres instruments « basés sur le marché ».

Sur ce point, la France et ses institutions financières publiques et privées se veulent exemplaires. Elles verraient bien la place de Paris devenir le centre mondial de la nouvelle finance climatique, avec ses cotations d’obligations vertes – les dettes émises par les entreprises ou les collectivités publiques sur les marchés pour financer des projets supposés bénéfiques pour le climat – et ses « reporting climat » : la publication par les investisseurs d’une estimation de l’empreinte carbone de leurs placements [1]. Ce projet recoupe une autre priorité gouvernementale, celle d’attirer en France, l’industrie financière de la City, suite au Brexit.

Tout cela est-il vraiment exemplaire en matière de préservation d’une planète vivable ? Comme vient de le rappeler opportunément un appel lancé par 80 économistes, une première décision raisonnable serait de ne plus financer de nouveaux projets pour extraire du charbon, du pétrole et du gaz, ces sources fossiles qui sont de loin les premières sources de gaz à effet de serre. Une analyse effectuée par l’Observatoire des multinationales et l’ONG 350 France (lire notre article présentant cette étude) montre qu’en réalité, l’argent des Français continue aujourd’hui de financer des nouveaux projets d’énergies fossiles partout dans le monde. Ces projets sont incompatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris, car ils contribuent à ouvrir de nouveaux territoires à l’industrie pétrolière et gazière, comme l’Arctique ou les gisements pétroliers au large du Brésil.

Nous présentons ici une sélection de douze projets très polluants directement ou indirectement financés avec l’argent issu de nos impôts, de notre épargne ou de nos cotisations retraite. Ce panorama soulève une question fondamentale : la finance « verte », sous sa forme actuelle, peut-elle réellement permettre le changement de direction dont nous avons besoin, ou ne constitue-t-elle qu’un simple habillage pour que les gros pollueurs puissent poursuivre le business mortifère ? [2]

1. L’exploitation pétrolière dans l’Arctique norvégien