A Jérusalem-Est, le mal-être quotidien des Palestiniens

Par Nissim Behar, Envoyé spécial de Libération à Jérusalem — 27 octobre 2015 à 19:46

La municipalité ne consacre que 10 % de son budget aux Arabes, alors que ceux-ci représentent près de la moitié de la population.
Lorsqu’il a, en 1997, autorisé trois familles juives à s’installer à Ras al-Amud, l’un des villages palestiniens annexés dans le « Grand Jérusalem » après la guerre des Six Jours (juin 1967), Benyamin Nétanyahou, qui venait d’entamer son premier mandat de Premier ministre de l’Etat hébreu, avait promis que l’affaire en resterait là. Que ces jeunes couples religieux, entourés de leur marmaille, créeraient une « yeshiva » (école talmudique) dévolue à l’étude de la Torah.

Dix-huit ans plus tard, la colonie de Maalei Hazeitim compte une centaine de familles nombreuses, résidant dans des immeubles modernes et gardés vingt-quatre heures sur vingt-quatre par des vigiles privés hyper entraînés - des anciens des unités spéciales de Tsahal - grassement payés par le ministère israélien de la Défense.

« Malaise social »

« Il existe une quarantaine d’implantations semblables dans les quartiers arabes de Jérusalem. Regardez la différence entre leurs infrastructures et celles, décaties, dont bénéficient les Palestiniens des alentours », soupire Ibrahim Ziam, un ancien journaliste de Kol Israël (la radio publique israélienne) résidant à Tzour Baher, un autre quartier arabe de la ville. Qui demande : « Croyez-vous que c’est un hasard si la plupart des attaques à l’arme blanche de ces derniers jours ont été lancées par des habitants de la partie orientale de Jérusalem ? Evidemment non ! Bien sûr, le problème du statu quo entre musulmans et juifs sur l’Esplanade des mosquées joue un rôle important dans le développement de ce cycle de violence. Mais le malaise social et le mal-être quotidien n’y sont pas étrangers non plus. » Et de poursuivre : « Alors que les Palestiniens de Jérusalem représentent 40 % de la population de la ville, la municipalité ne leur consacre que 10 à 11 % de son budget. C’est simple : comme ses prédécesseurs Ehud Olmert et Uri Lupolianski, l’actuel maire de Jérusalem, Nir Barkat, n’est jamais venu chez nous. Il se démène beaucoup pour animer la ville avec des festivals mais tout se passe à l’ouest. Nous, on n’existe pas. »

Aujourd’hui retraité, l’ex-journaliste fulmine : « On ne croise pas de fanatiques du jihad à Tzour Baher, mais des médecins employés par l’hôpital Hadassah, des directeurs d’agence bancaire, des ingénieurs et de nombreuses familles établies. Pourtant, depuis sa victoire de 1967, Israël n’y a jamais refait les égouts. Lorsque c’est bouché, on doit se débrouiller tout seuls, parce que la mairie répond qu’il n’y a pas de budget. »...

à suivre