Article de synthèse contre la modification de l’article 133 du traité d’Amsterdam

mardi 14 novembre 2000, par Webmestre

Article de synthèse contre la modification de l’article 133 du traité d’Amsterdam
Pour une vraie Charte, pour de vrais droits, pour une autre Europe, civique et sociale
L’Union européenne a décidé de se doter d’une Charte des droits fondamentaux. On nous dit que l’Europe doit être celle de la citoyenneté et des droits, et pas seulement celle des marchés, des banques et de la monnaie unique. Qu’en est-il en réalité ?
Des droits peau de chagrin
Ce projet de Charte est particulièrement préoccupant en ce qui concerne les droits sociaux : il est en régression sur le droit social français, mais aussi sur l’ensemble des droits nationaux des Quinze et même sur le droit international. Ne sont pleinement reconnus ni le droit à l’emploi, ni le droit à la retraite, ni le droit à un revenu minimum, ni le droit au logement (auquel on substitue un droit à l’aide sociale, c’est-à-dire à la charité)...et le lock-out est légitimé au même titre que la grève.
Des droits à la carte
Lorsque le projet de Charte fait mention d’un droit social, il se contente en général de renvoyer à chaque droit national non seulement sa mise en oeuvre mais même sa définition : le texte ne définit clairement aucun droit précis, il se contente de formules trop vagues pour apporter une véritable garantie. C’est le cas pour le droit à l’éducation (article 14), pour les droits des travailleurs à l’information et à la consultation au sein de l’entreprise (article 25) et à la négociation et à l’action collectives (article 26), pour le droit à la protection sociale (article 32), pour le droit à la santé (article 33), ou encore pour le droit à des ``services d’intérêt économique général’’ (article 34). Cela veut dire non seulement que la Charte ne garantit aucun droit mais aussi qu’elle légitime l’inégalité des droits (et même celles des ``pratiques sociales’’...) d’un Etat à l’autre. Sur ce point décisif, c’est une vision libérale qui l’a emporté.
La démocratie contournée
Ce projet de Charte a été entériné par une soixantaine de parlementaires et d’experts réunis en Convention pendant quelques mois. Les ONG ont été correctement informées des travaux et ont pu proposer des amendements en disposant de...cinq minutes chacune pour les défendre ! Comment accepter une telle méthode ? La Charte est au coeur de l’Europe des droits. Comment accepter qu’elle soit rédigée dans un petit cercle d’experts et de représentants des Etats avant d’être approuvée par... 15 Européens en tout et pour tout (les chefs d’Etat et de gouvernement qui participent aux sommets européens) ? Il faut qu’elle soit débattue au Parlement européen et dans les Parlements nationaux : quand il s’agit des droits et de la citoyenneté, on n’esquive pas la démocratie.
La position d’Attac
Dans tous les pays d’Europe, les syndicats, associations, ONG refusent à la fois le contenu de ce texte et la méthode qui à prévalu à son élaboration. Face à une Charte qui constitue une agression contre les droits sociaux, et dont le statut est par ailleurs très préoccupant, Attac est solidaire des syndicats et de tous les mouvements citoyens qui la refusent. Regroupant des personnes physiques et morales aux opinions très diverses sur l’architecture future de l’Union européenne, l’association n’a pas à prendre position sur cette question. En revanche, elle se prononce et se prononcera sur les politiques menées ou projetées par l’Union :

* pour une politique monétaire européenne orientée vers la croissance et l’emploi, ce qui passe par la remise en cause, dans les traités, de l’indépendance de la Banque centrale européenne et par son contrôle démocratique ;
* pour une réforme complémentaire des traités plaçant la cohésion économique et sociale au-dessus du principe de la concurrence ;
* pour la remise en cause du Pacte de stabilité budgétaire, véritable plan d’ajustement structurel appliqué à l’Union ;
* contre l’obligation faite aux pays candidats à l’adhésion de se plier aux normes ultralibérales qui leur sont imposées ;
* pour la défense de la conception de service public
* ; pour la remise de la dette publique du tiers monde par les pays membres de l’Union ;
* contre tout nouveau pouvoir confié à la Commission dans les négociations commerciales internationales ;
* pour la subordination du commerce international au respect des droits fondamentaux et, dans ce cadre, pour l’exclusion totale de l’éducation, de la santé et de la culture du champ des discussions à l’OMC ;
* pour la protection de l’agriculture paysanne dans l’Union et contre les restitutions aux exportations agricoles ;
* pour un véritable partenariat économique, social et culturel
* avec les pays tiers du Sud ; pour la mise en place d’urgence d’une instance démocratique de réflexion entre l’UE et l’Afrique ;
* pour une zone Tobin en Europe ;
* pour une lutte déterminée contre les mondes sans lois de la finance (paradis fiscaux et autres), en commençant par ceux situés en Europe, et leur utilisation habituelle par les intérêts financiers et industriels européens ;
* pour l’interdiction de la complaisance maritime mondiale et de son utilisation par les affréteurs et armateurs européens ;
* pour la liberté de circulation des personnes et des idées au sein de l’UE, pour l’octroi des droits sociaux à tous les travailleurs migrants et pour l’extension des droits civiques à ceux d’entre eux qui sont durablement installés ;
* et, d’une manière générale, pour une véritable politique sociale européenne hissant les droits vers le haut au lieu de les tirer massivement vers le bas.

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