Manifeste : Commission « démocratiser l’entreprise »

dimanche 30 avril 2006, par Webmestre

(en pj démocratiser l’entreprise .doc complet avec schéma)

Manifeste : Commission « Démocratiser l’entreprise »
d’ATTAC-Rennes

« DEMOCRATISER L’ENTREPRISE » :

LES PREMIERES ET URGENTES MESURES A MINIMA A PRENDRE

Les investissements et l’innovation réelle marquent le pas, les entreprises distribuent désormais plus d’argent aux actionnaires que ces derniers ne leur en versent, les salaires et les contrats de travail sont violemment attaqués : jamais la concentration de richesses entre quelques mains seulement au pouvoir hypertrophié n’a été aussi forte depuis la dernière guerre, créant ainsi une régression économique pour la grande majorité des gens, y compris les plus diplômés, le tout en hypothéquant l’avenir. Pour ce faire, la pression sur les salariés, des ouvriers aux cadres, devient insupportable : plus de 13 000 délégués syndicaux virés chaque année, actions psychologiques individualisés inadmissibles et permanentes. Le désarroi des travailleurs est profond, leur faisant douter de tout. Le pourrissement de la situation, l’Histoire nous l’a appris, est lourde de danger fascisant.
Pourtant ces salariés sont au centre des systèmes productifs : ils savent ce qu’il faudrait faire, à l’échelle de leur propre « entreprise ». Comme il n’y a plus rien à attendre de ces actionnaires anonymes, sinon le pire, il convient de donner à ces travailleurs les pouvoirs nécessaires sur leurs lieux de production. Ils sauront l’utiliser pour relever la barre rapidement.

Ce que nous proposons ici au débat, ce sont des outils législatifs et réglementaires qui pourraient être très rapidement mis en place afin de répartir de manière décisive les pouvoirs dans les entreprises, quitte ensuite à les faire évoluer selon les niveaux d’exigence des salariés, et plus généralement de l’ensemble des travailleurs.


1- Ce que devrait être l’objectif général de toute « entreprise » :
L’objet de l’entreprise est de créer des richesses pour tous. Son objectif fondamental est d’assouvir les besoins diversifiés de la population dans un environnement durable en respectant les acteurs de la production.

2-L’objectif économique et politique général à atteindre :
Reconquérir les pouvoirs de décisions stratégiques économiques dans les entreprises et dans le pays, et donc la reconquête nécessaire du politique.
Les conditions générales : La démocratisation concomitante et des lieux de production et de l’Etat (dans son sens large).

3-La démocratisation des lieux de production :
La démocratisation des lieux de production doit se faire aux deux niveaux suivants, mais de manière différente :
- pouvoirs de décisions stratégiques : choix des orientations de la production, des investissements, de la répartition des richesses, contrats de travail, ... ;
- pouvoirs de décisions opérationnelles : choix organisationnel, niveaux de compétences, formations, ... par négociation.
L’environnement de l’entreprise doit être contrôlé par des instances plus puissantes qu’elle, émanant des élus politiques dont le rôle et la représentation sont à refondre.
De ces principes, on peut déduire les mesures et les hiérarchies suivantes, rapides à mettre en œuvre :

Magistrature économique et sociale indépendante : Commissaires aux comptes, Inspection du travail, Médecine du travail, Instituts de formation professionnelle, ...
Pour accroître l’indépendance des Commissaires aux Comptes nous demandons que le contrôle des comptes et de la gestion des sociétés soit exercé par des professionnels qualifiés dont la rémunération soit assurée par des cotisations versées par les entreprises ; que leur désignation se fasse sur une liste d’aptitude par le juge.

Les membres du directoire doivent être choisis et désignés d’un commun accord entre les deux conseils, actionnaires et salariés.
C’est une première évolution que nous demandons.
Mais notre demande ne s’arrête pas là. Nous avons vu que les trois parties prenantes d’une entreprise sont les actionnaires, les salariés et la collectivité publique, locale, nationale , européenne, mondiale en fonction de la taille de l’entreprise considérée. Celle-ci, chargée de l’intérêt général des habitants et de la paix sociale, a à se prononcer sur l’utilité sociale de l’activité de l’entreprise et son mode de gestion du personnel. Il nous paraît nécessaire qu’elle soit présente dans les instances de contrôle des actes de la direction (sous la forme d’un Commissaire du Gouvernement ?).

4- Le défi politique le plus important :
Comment faire partager le plus largement possible l’idée de la nécessité d’une démocratisation des organisations productives, gage d’efficacité sociale, dans un délai le plus court possible ? C’est sans doute l’un des plus importants défis politiques : le rôle d’ATTAC doit être central comme elle l’a été pour le Projet du Traité Constitutionnel Européen.

5- La forme juridique de l’organisation productive :
Légaliser des formes juridiques de l’organisation productive, et non plus seulement des « sociétés » d’apporteurs de parts ou d’actions à pouvoirs désormais limités (par les mesures ci-dessus) : voir propositions dans l’ouvrage du CS d’ATTAC.
En tout état de cause, la hiérarchie des normes demeure essentielle : un contrat de travail ne peut déroger à un accord d’entreprise, un accord d’entreprise ne peut déroger à une convention de branche, une convention ne peut déroger à la loi de manière défavorable aux travailleurs.
Un accord d’entreprise dérogatoire n’est valable que s’il est signé par des organisations syndicales ayant recueilli au moins la moitié des suffrages valablement exprimés.
Le secret de gestion doit être levé, y compris les stratégies d’innovations. Suppression de toute notion d’informations confidentielles (sauf personnelles).

6-A une action, toujours une réaction :
Les apporteurs de capitaux (propriétaires) ne se laisseront pas déposséder de leurs pouvoirs absolus dans « leurs » entreprises. Ils se battront bec et ongles contre les propositions de démocratisation, et ce de manière globale (intimidations dans les entreprises, actions idéologiques par leurs médias -plus de 90% leur « appartient »- élus choisis, etc ...). Le MEDEF est leur outil politique et idéologique principal.

Comment contrecarrer de telles réactions, comment utiliser celles-ci pour faire avancer l’idée de démocratisation ?
Rappelons nous de l’après guerre : les forces de la Résistance avaient réussi, malgré leur diversité, à imposer au patronat de manière décisive suite à sa collaboration avec l’occupant. D’où les grandes réformes positives, telles la Sécurité Sociale, qui ont été adoptées. Celles-ci ont été à l’origine d’une forte distribution des richesses dans le pays, qui est elle-même à l’origine du progrès social dit des « trente glorieuses » (et non l’inverse).

Aujourd’hui le MEDEF s’est bien compromis dans la pénétration du rouleau compresseur néolibéral en France. Cependant son idéologie commence à être sérieusement remise en cause par une large partie de la population. Il faut continuer à l’isoler comme ont su le faire nos aînés.

D’ailleurs, qui d’autres que les travailleurs pourraient relever les défis de leurs entreprises respectives ? Sûrement pas les fonds de pension et autres, ni leurs mandataires qui ne s’intéressent qu’au rendement financier. Parmi les dirigeants des grandes sociétés, beaucoup gèrent plus en fonction du taux de profit à court terme qu’en fonction des logiques élémentaires du développement de l’outil industriel et commercial. Du coup le management dit stratégique s’est coupé de la vie concrète des organisations : ils ne savent plus gérer, ou ne gérer que les « deux chiffres ». Une fois les pouvoirs essentiels remis auprès des salariés, ces derniers sauront les utiliser : le management stratégique, ce n’est pas si compliqué qu’ « ils » ne le prétendent pour intimider.

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