Retraites : les compagnies d’assurance en embuscade

Depuis une semaine, le gouvernement et ses relais médiatiques jurent la main sur le cœur que la retraite par points, c’est pour sauver le système par répartition cher aux français, et qu’il ne s’agit absolument pas d’ouvrir les portes à la capitalisation ! Pourtant, tout démontre que c’est bel-et-bien l’objectif inavouable de cette réforme. Et les compagnies d’assurance se frottent déjà les mains :

Que sait-on de la retraite par points dans les pays où elle existe déjà ? Que la valeur du point ne fait que baisser, et que partout où ce système est en vigueur, les parlements votent des volets capitalisation obligatoires. Car au bout d’un moment, les points collectés ne suffisent plus à vivre décemment [1].

Et ce, même si c’est un organisme paritaire qui est chargé de vérifier la valeur du point, comme l’a annoncé Edouard Philippe mercredi dernier [2] : c’est aussi un organisme paritaire qui gère l’assurance chômage, mais du moment que c’est l’État qui fixe le cadre, il peut faire ce qu’il veut, et notamment des réformes brutales, comme on l’a vu le mois dernier [3]. Ce n’est donc absolument pas une garantie sur la valeur du point, puisque le « cadre » sera voté chaque année à l’assemblée lors du projet de loi de finances.

Ensuite, comme l’expliquait Jean-Michel Dumay dans sa dernière chronique Usage de Faux, la réforme des retraites en France propose de plafonner à 10 000 euros de salaires les cotisations et les droits en retour. Résultat, que vont-faire les cadres qui gagnent plus ? Et bien pour s’assurer un taux de remplacement correct, ils vont se tourner vers des complémentaires privées. Alors qu’aujourd’hui, dans le régime des cadres, ils peuvent cotiser et ouvrir des droits jusqu’à 30 000 euros de salaire par mois ! Rappelez-vous du mot, « répartition » : il s’agit de répartir entre ceux qui gagnent beaucoup et ceux qui gagnent moins. Avec cette réforme, les plus riches sortiraient du système et on pourrait se répartir l’argent des pauvres entre pauvres !

D’ailleurs, le gouvernement a déjà commencé à inciter les riches à se tourner vers la capitalisation : souvenez-vous de la fameuse Loi Pacte, dans laquelle étaient contenues les privatisations de FDJ, d’ADP, et un tas d’autres énormités. Dans cette loi Pacte, un article stipule que les cotisations à des plans d’épargne retraites privés sont désormais... déductibles à 100% des revenus du contribuable [4] ! Déductibles, comme les dons pour Notre-Dame. Nous subventionnons avec nos impôts la sécession des riches de notre système par répartition. Et l’assurance AG2R la Mondiale jubile sur son site internet : « La loi Pacte vise à rendre ces produits plus attractifs ».