Maroc : Soutien aux condamnés de Taghjijt

Courrier d’Attac 45 au Premier Ministre du Maroc.

Monsieur,

Nous avons eu connaissance de la répression policière et judiciaire qui s’est abattue en décembre dernier sur plusieurs personnes à Taghjijt, principalement des étudiants et militants. Sa sévérité est sans comparaison avec les faits reprochés, et nous tenons à vous faire part de notre indignation.

Nous demandons donc que Abdellah Boukfou, Abdelaziz Selami, Habib Ahmed, Mohamed Chouis et Bachir Hizam, condamnés et emprisonnés injustement, soient libérés le plus rapidement possible.

Avec nos respectueuses salutations,

pour ATTAC 45
(Loiret, France),
le président.

*Copie au Ministère de l’Intérieur et au Ministère de la Justice.

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Taghjijt : répression brutale pour de banales revendications

Des peines de 12 à mois de prison, un militant d’Attac Maroc condamné à six mois de prison ferme

Taghjijt est une oasis de près de 7000 habitants, situé au Sud est d’Agadir, dans le sud du Maroc.

Pour la fête du mouton, plusieurs jeunes de Taghjijt, étudiants dans d’autres villes du Maroc, sont revenus au pays pour passer la fête en famille. Mais il y a des problèmes de transport pour revenir dans leurs universités. Une trentaine d’entre eux se rendent alors, le 1er décembre, au Caïdat pour réclamer des moyens de transport ainsi que quelques autres revendications d’ordre social (une bibliothèque pour la Maison des jeunes, etc...). Pour toute réponse, le Caid fait arrêter trois des jeunes venus déposer leur dossier revendicatif.

La délégation se transforme en rassemblement massif de protestation et le caïdat fait intervenir les forces de l’ordre qui vont disperser violemment les manifestants pour pouvoir évacuer les détenus vers la capitale de la province, Guelmim.

Pendant plusieurs jours, la ville sera en état de siège, des renforts de gendarmerie et Forces auxiliaires sont appelés, contrôlent les entrées et sorties de Taghjijt et recherchent activement une liste de personnes désignées par le Caïd. Deux nouvelles arrestations interviennent : le propriétaire d’un cybercafé sera hospitalisé pendant deux jours à l’hôpital de Guelmim suite aux tortures qui lui ont été infligées dans un des locaux de la municipalité.

Au total 5 personnes sont arrêtées, et de victimes vont être transformées en agresseurs puisqu’ils sont inculpés d’outrages à fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions et de dégradation d’établissements publics (rappelons que trois d’entre eux étaient déjà arrêtés avant l’intervention de la police, dans le cadre d’une délégation tout à fait pacifique !).

Le jeudi 10 décembre, une caravane venue de tous les villages et villes environnants vient, à l’appel des groupes Attac de la région, apporter leur solidarité aux détenus et aux habitants de Taghjijt.

Le mardi 15 décembre se tient le procès des 5 détenus devant le tribunal de 1ère instance de Guelmim. De nombreux parents et amis sont venus assister au procès, ainsi que des membres d’Attac et des organisations de droits humains. Le verdict est rendu en fin de journée :
 Abdellah Boukfou est condamné à un an de prison ferme
 Abdelaziz Selami (membre du bureau d’Attac Guelmim) et Habib Ahmed, Mohamed Chouis sont condamnés à 6 mois fermes
 Bachir Hizam, blogueur, est condamné à quatre mois fermes.
Tous sont en outre condamnés à une amende de 500 dirhams chacun.

Une répression et un procès d’une sévérité invraisemblable qui va transformer un simple problème de transport près l’aïd en scandale national et international et vient confirmer le tournant hyper-sécuritaire pris par le gouvernement marocain. Après les luttes de Sidi Ifni, et face à un mouvement social multiforme qui se développe partout dans le Maroc, et tout particulièrement dans de nombreuses localités du Sud du pays, l’Etat marocain manifeste une nervosité évidente devant tout contestation organisée, aussi banale et bénigne soit-elle, qui va de pair avec son incapacité à apporter des solutions à la précarité, au chômage et à la marginalisation que vit cette région.

Quant à la justice, de tels procès confirment une fois encore son caractère expéditif et sa totale dépendance des décisions du pouvoir. Car ce n’est pas un cas isolé : un procès similaire s’est tenu devant le même tribunal une semaine auparavant : des jeunes chômeurs d’Assa ( à quelques dizaines de kilomètres de Taghjijt) étaient poursuivis pour avoir réclamé des cartes de la solidarité nationale (donnant accès à des emplois d’utilité publique, de courte durée).

Quant aux procès d’étudiants, ils se multiplient dans toute la géographie du Maroc. A Fès, Marrakech, Agadir, les procès sont reportés de séance en séance, imposant aux dizaines d’étudiants détenus de longs mois de prison "de facto" car les demandes de mise en liberté provisoire sont refusées.

Aziz Selami et ses camarades doivent être libérés. Faites circuler l’information. Ecrivez des lettres de protestation à

Monsieur Abdelwahab Radi Ministère de la justice :
 Fax 00 212 037723710 courrier@mj.gov.ma
M. Abbas el Fassi Premier Ministre :
 Fax : 00 212 037761777 courrier@pm.gov.ma
M. Chakib Benmoussa - Ministre de l’Intérieur :
 Fax 00 212 037766861 ou bien 212 037767404 courrier@mi.gov.ma