L’UE espère un accord sur sa Constitution et un successeur à Prodi

BRUXELLES (AFP) - Les dirigeants de la nouvelle Europe à 25 espèrent sceller leur premier sommet depuis l’élargissement du 1er mai par un accord historique sur la Constitution de l’UE, mais devront aussi s’atteler au difficile choix du successeur de Romano Prodi à la Commission européenne.
La gifle des élections européennes, boudées par plus d’un citoyen de l’Union sur deux, a accru le sentiment d’urgence à boucler le chantier constitutionnel, qui a divisé les Etats membres depuis son lancement il y a plus de deux ans. "Le sentiment général est que l’on va vers un accord", a déclaré le chef de la diplomatie française Michel Barnier, à l’issue des derniers pourparlers avec ses homologues lundi à Luxembourg. "Le message des électeurs à travers l’Europe est qu’ils veulent voir une Europe plus efficace... C’est le genre de chose que seul un nouveau traité constitutionnel peut apporter", a renchéri le Britannique Jack Straw. La Constitution sera le premier sujet abordé par les dirigeants européens, dès leurs retrouvailles jeudi. La présidence irlandaise affiche un optimisme prudent. Les chefs d’Etat et de gouvernement doivent encore placer la clé de voûte de la Constitution : le dispositif institutionnel qui déterminera l’influence de chaque Etat membre au sein du continent réunifié. Ce paquet final doit graver dans le marbre le nombre d’eurodéputés par pays, la représentation des différentes nationalités à la Commission européenne, et surtout le poids respectif de chacun dans les votes au Conseil des ministres de l’Europe élargie. Sur ce dernier point, le système dit de la "double majorité" a finalement été retenu, mais il reste à en arrêter les modalités. Le projet initial de Constitution prévoyait qu’une décision soit adoptée lorsque 50% des Etats membres pesant au moins 60% de la population de l’UE la soutiennent. Mais l’Espagne souhaite un relèvement aux deux tiers du critère de population. L’Autriche tente de fédérer les "petits" et nouveaux pays autour de seuils équivalents à 50/50. La Pologne veut la garantie de ne pas trop perdre, par rapport au traité de Nice qui lui donnait quasiment le poids d’un grand. Selon les diplomates, le scénario le plus probable reste celui d’une majorité à 55% des Etats, pesant 65% de la population, avec divers garde-fous pour limiter les risques de blocage. D’autres désaccords subsistent, notamment la sempiternelle querelle de la référence au christianisme dans le préambule de la Constitution. L’accord final sur la Constitution est espéré vendredi en fin d’après-midi. Entre-temps, les chefs d’Etat et de gouvernement devront plancher jeudi sur la succession de M. Prodi. Prétendant le plus en vue, le chef du gouvernement belge Guy Verhofstadt (libéral) est le favori de la France et de l’Allemagne, mais il risque de heurter le Royaume-Uni et les conservateurs européens, confirmés dimanche dans leur rang de premier parti à l’assemblée de Strasbourg. L’un des seuls dirigeants à avoir échappé au naufrage collectif des européennes, l’indéboulonnable Premier ministre du Luxembourg Jean-Claude Juncker, aurait été le candidat idéal. Mais il a juré à ses électeurs de rester au pays. "M. Juncker a été très net, publiquement ou en privé. Il a souligné qu’il s’agissait pour lui d’une question d’éthique personnelle. Il serait hasardeux de spéculer sur un changement de sa position", affirme un diplomate bruxellois de haut rang. D’autres noms plus ou moins crédibles circulent : les commissaires européens Antonio Vitorino (Portugal), Chris Patten (Royaume-Uni), le président du PE sortant Pat Cox (Irlande), l’ex-Premier ministre grec Costas Simitis, ou le Premier ministre irlandais Bertie Ahern, malgré ses dénégations répétées.